Suite à l’article sur les spots de surf à Anglet: chronologie d’une mort annoncée, « SOS Littoral Angloy » nous livre ici des pistes de réflexion pour oxygéner le littoral angloy et rétablir l’équilibre côtier à Anglet:

Plusieurs pays comme les Etats-Unis, les Pays Bas, l’Espagne et la France ont développé ces quarante dernières années des méthodes de lutte contre l’érosion, qualifiées de « douces » par les spécialistes. Elles ont fait leurs preuves au fil du temps comme on peut le voir ici ou . Voici celles qui sont adaptées au cas particulier d’Anglet :

1-D’abord, il faut rétablir le cycle du sable des plages angloyes afin d’avoir zéro perte, sinon cela revient à remplir un panier percé : tant que le trou n’est pas bouché, le sable file au travers. Il faut donc recharger les plages d’Anglet en faisant systématiquement du clapage côtier comme à l’époque où le port possédait sa drague entre 1974 et 1990. Le fait d’avoir une drague à demeure optimiserait ses sorties dès que les conditions le permettent, afin de ramener 100% du sable dragué sur le sud de la côte.

Le dragage, délégué à la CCI de Bayonne par le Conseil Régional d’Aquitaine, sert l’activité portuaire. Elle est donc responsable des dégâts collatéraux (dommageur = payeur). La CCI bénéficie d’une enveloppe annuelle de 2,5 millions d’euro pour l’entretien du chenal. Elle a donc les moyens d’acheter une drague, de l’entretenir et de payer le personnel à son bord. En planifiant le projet sur 10 ans, on se rend vite compte que la CCI de Bayonne ferait gagner de l’argent à l’Etat. Cela lui permettrait aussi d’évoluer en adéquation avec l’environnement côtier.

2- Si le premier point est effectué dans les règles de l’art, alors on pourra modifier sereinement le profil des plages en ramenant vers le bas de l’estran une partie du sable accumulé en haut de l’estran depuis 2003 (1), sans que celui-ci ne finisse clapé au large ! La pente de la plage redeviendra plus douce et donnera aux vagues la chance d’avoir un déferlement plus creux à des marées plus hautes. On aura aussi une action de lutte contre les trous d’eau, les shore break violents et le back-wash.

3- Mais cela ne suffira pas, car il faut inverser la tendance érosive qui a été générée par le dragage dès 1896 et accélérée ces 40 dernières années. Les conséquences de cette pratique sont coûteuses à la ville d’Anglet et au contribuable car il faut régulièrement financer les défenses contre l’océan.

Aussi, il faut également aller chercher notre sable stocké au large, une bonne partie dormant là depuis plus de 100 ans. Ce sable n’attend qu’une seule chose, c’est d’être réveillé pour retrouver sa place originelle. Aujourd’hui, toutes les dragues qui sortent des chantiers navals du monde entier sont capables d’aller chercher ce sable qui git à partir de – 12 mètres. Cette solution a un faible coût et un faible impact carbone. Si le port de Bayonne acquiert une drague, le prix du sable transporté au m³ sera 100 fois moins cher que celui amené par camion soit 0.10€ contre 10€ par camion. Par ailleurs, ce stock qui repose au large permettrait de tenir au moins 120 ans!

Ce retour massif de sable sur la partie immergée des plages provoquera la réapparition d’une vraie barre subtidale (2) sur tout le littoral angloy. Cela aurait un double intérêt :

-on verrait le retour de véritables bancs de sable donnant des vagues plus longues et moins tendues sur toutes les plages.

-lors des marées hautes, les grosses houles perdraient une plus grosse partie de leur énergie au large, diminuant ainsi leur pouvoir érosif dans les shore break.

4- A moyen terme, si la tendance à l’engraissement des plages se confirme, on pourra envisager l’abandon de la majorité des digues et enrochement des plages d’Anglet. Le sud du littoral retrouvera alors son visage d’antan, c’est-à-dire un profil plus naturel grâce au rétablissement des échanges sédimentaires entre chaque plage. Ce serait une véritable économie pour la commune quand on sait par exemple que les réfections des musoirs de la digue des Sables d’Or et de Marinella ont coûté chacun entre 600 000 et 800 000 € en 2008 et 2009. Au nord des plages, l’abandon de la digue des Cavaliers et de la digue intérieure de La Barre pourrait être envisageable, puisque aujourd’hui leur efficacité est assez discutée et l’entretien régulier du chenal par une drague à demeure ferait disparaitre la nécessité de ces enrochements. Enfin on ne peut se priver de la grande digue du Boucau car elle sécurise l’entrée des cargos au port de Bayonne et est nécessaire au développement de l’activité industrielle.

Le contrat de maintien des profondeurs du chenal de l’Adour passé par la CCI de Bayonne avec l’armateur de la drague Mellina s’arrête fin 2013. Un choix de bon sens s’impose. Les politiques de l’agglomération doivent intervenir auprès de la CCI de Bayonne afin qu’elle fasse les choix qui respectent l’environnement côtier et ne coûte plus aux contribuables. S’ils échouent, il y a fort à parier que le surf et l’activité touristique balnéaire de la côte angloye poursuivront leur déclin. Une étude venant des Etats-Unis a démontré que la première population à faire vivre une station balnéaire était celle des surfeurs. Les temps ont changé, on est loin de l’époque où les surfeurs vivaient dans leur van et mangeaient trois pommes !

Parmi nos élus, peu sont surfeurs et très peu se soucient du surf. Pourtant ce sont les premiers à «surfer sur la vague» en termes d’image. Il faudra certainement un mouvement citoyen ou une catastrophe pour que leur point de vue ne change. Quel héritage laisseront-ils aux prochaines générations, quel héritage laisserons-nous à nos enfants ?


La drague Mellina, ici en plein dragage de la fosse de garde, a le profil de l’emploi ! (Photo Rico Bayle)


L’addition des 116 ans de dragage donne un résultat vertigineux: 43 millions de m³ de sables ont été arrachés du littoral pour être abandonnés au large, soit 123 fois le volume de la tour Montparnasse. Contrairement à ce que les gens imaginent, le sable stocké au large ne revient pas tout seul sur la côte ! En-dessous de 8 mètres de profondeur, il ne peut plus remonter la pente…

L’équipe SOS-LA ( http://sos-la.blog.fr )
(1) date de la construction de la promenade Victor Mendiboure.
(2) La barre subtidale qualifie une zone située en deçà des variations du niveau de l’eau dues aux marées, et par conséquent toujours immergée.

Lire aussi dans Sud-Ouest: – ils militent pour le retour de la « Sangsue ».

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Surf Prevention est le site sur le Surf, la Sécurité, la Santé et l'Environnement.

 

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4 Commentaires

  1. NOTTIN CHRISTOPHE dit :

    Tout d’abord merci pour transmettre ces informations au plus grand nombre.
    Déja avisé par le sujet je suis toujours très étonné par certains paradoxes et voici deux à trois réflexions:

    On nous demande de faire des études scientifiques pour les uns, artistiques pour d’autres, de cuisine et j’en passe naturellement.
    Et curieusement ce cerveau que nous avons un tant soi peu développé doit rester endormi pour le bien sociétal et pour le maintien de l’ordre. Voilons les faces !

    Les élus sont parfaitement au courant des problématiques du littoral car ils sollicitent des bureaux d’études qui emploient ces jeunes.
    Nous voyons tous l’accélération du phénomène décrit dans cet article et rien n’est fait pour transformer cette catastrophe annoncée.
    Car oui, c’est une catastrophe. Sur le plan économique, environnemental, touristique… et les humains que nous sommes continuent de voter comme des brebis ou moutons (au choix) oubliant le pouvoir des urnes et tout simplement la force populaire.
    Notre nation est tout simplement le pays d’Europe le plus corrompu et nous nous berçons d’illusions imaginant que notre littoral retrouvera un jour ses caractéristiques historiques.
    On appelle cela l’évolution! Et le prix à payer est bien ce qui est exprimé dans l’article.
    C’est un sujet qui en cache bien d’autres.
    Alors pour finir, cessons de nous plaindre et quand vous voyez l’élu de votre quartier qui a su vous serrer (et qui continuera) la pogne en vu des élections n’oubliez pas:
    L’érosion du littoral
    La pollution des produits chimiques pour nettoyer nos plages
    Les infections déclarées
    La mort de la chaîne alimentaire
    et surtout NOTRE MORT ANNONCÉE.

    Avec toute ma bienveillance

    Christophe NOTTIN

  2. SIMON dit :

    bien vu l’aveugle 🙂

  3. Patrick dit :

    Projet tres interessant… cette drague pourrait sans doute etre utile au delà des plages d’Anglet…

  4. souleyman dit :

    Bonjour.
    Je suis marin, interessé par le projet de drague à bayonne…

    J’ai une proposition: on remet tout le littoral Angloy dans l’etat dans lequel il etait en 1970, en ne conservant que la digue du boucau.
    ceci impliquerai de casser toutes ces verrues en bord de mer sur une distance de 800m a compter de la lie de basse mer…vous vouliez quelque chose d’efficace? ben voila…cassons la chambre d’amour…

    salut.

    bonne journée

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