Voici un extrait de la thèse récente sur l’exostose du Docteur Eric Gilbart.

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ETUDE STATISTIQUE REALISEE SUR 81 SURFEURS BRETONS :

Il m’a semblé important d’illustrer les propos de la première partie de cette thèse par une étude prospective de 81 surfeurs bretons.

Observer sur le terrain ce qui a été mis en évidence par une multitude d’auteurs depuis un demi-siècle : à savoir que la pratique du surf est un facteur prédisposant au développement des exostoses.

Le but de cette étude appliquée à 81 surfeurs bretons est de répondre à plusieurs questions :

Quelle est la prévalence des exostoses dans cette population de surfeurs ? Quelle est la période minimale et moyenne d’exposition avant d’observer des exostoses ? Est-ce que les surfeurs pratiquant ce sport toute l’année sont plus atteints que ceux ne surfant que l’été? Y a t il une corrélation entre le nombre de jours passés dans l’eau et la sévérité des lésions ? Les moyens de prévention sont ils efficaces ? Les filles sont elles touchées de la même façon que les garçons ? L’apparition et l’intensité des signes fonctionnels sont ils liés au degré de sténose du conduit auditif externe ? Les deux conduit auditifs externes sont ils atteints de la même façon ? Est ce que le fait de débuter le surf à l’adolescence engendre des lésions plus sévères ?

I. Méthodes de travail :

Le recueil des données fait via un questionnaire et un examen otoscopique des conduits de chaque surfeurs, a été réalisé entre Janvier 2006 et Juillet 2007, au sein des écoles de surf de Guidel et de Plouharnel, ainsi qu’auprès de surfeurs pratiquant leur sport sans être affiliés à un club, sur les différents spots morbihannais.

Le critère d’inclusion était la seule pratique du surf depuis au moins un an quelque soit la fréquence d’exposition, le temps d’exposition, le sexe, l’âge, la pratique d’autres activités aquatiques en parallèle. Le but du recrutement était d’avoir une proportion semblable de surfeurs pratiquant leur sport depuis moins de 5 ans, entre 6 et 10 ans, entre 11 et 15 ans et plus de 16 ans, pour suivre l’apparition et l’évolution des exostoses.

A. Matériels utilisés :

Après avoir répondu à mon questionnaire, j’examinais le conduit auditif externe du surfeur à l’aide d’un otoscope HEINE Mini 2000.

B. Classification anatomo-clinique :

Pour chaque surfeur était précisé la présence ou non d’exostoses.

Si il y avait des exostoses : pour chaque oreille nous avons précisé le nombre des exostoses, leur siège d’implantation, le degré de sténose (classé en quatre groupes ; 1 : 0~25% ; 2 : 25~50% ; 3 : 50~75% ; 4 : 75~100%), la présence d’otite externe ou moyenne et nous avons réalisé un schéma de leurs CAE.

C. Questionnaire : voir thèse .

D. Caractéristiques de la pratique du surf en Bretagne :

La température de l’eau en surface entre Guidel et Quiberon varie entre 10° et 19°C tout au long de l’année.

Voir thèse.

II. Caractéristiques de l’échantillon :

Entre janvier 2006 et juillet 2007, 81 surfeurs ont été interrogés via un questionnaire et ont été examinés. Tous étaient des surfeurs habitués à pratiquer leur sport en Bretagne entre la presqu’île de Quiberon et Guidel. Le recrutement eut lieu à l’école de surf de Guidel en Janvier 2006, lors des championnats du Morbihan les 6 et 7 mai 2006 à Guidel-Plages, sur les spots de Plouharnel et de Quiberon, dans les surfshops de la région d’Auray tout au long des années 2006 et 2007.

A. L’âge :

L’âge moyen est de 25 ans allant de 10 à 47 ans.

Le graphique suivant montre la répartition des surfeurs en fonction de leur âge. Voir thèse.

B. Le sexe :

Sur 81 surfeurs, 7 étaient de sexe féminin.

L’âge moyen de ces surfeuses est de 20 ans, allant de 15 à 28 ans. Ces surfeuses pratiquent le surf depuis 4 ans en moyenne. L’une surfe depuis 1 an tandis qu’une autre surfe depuis 8 ans.

C. Nombre d’années de pratique de surf :

Il était important dans le recrutement des surfeurs pour cette étude d’avoir autant de surfeurs dans les 4 groupes pré-établis en fonction du nombre d’années surfées.

22 surfeurs dans le groupe 1-5 ans ; 27 surfeurs dans le groupe 6-10 ans ; 21 surfeurs dans le groupe 11-15 ans ; 11 surfeurs dans le groupe > 16 ans.

Le but de ce recrutement étant de connaître à quel moment apparaissent les exostoses et de suivre leur développement en fonction du nombre d’années surfées.

Les surfeurs de cet échantillon se répartissent équitablement dans les différents intervalles du nombre de jours surfés, du nombre d’années passées à surfer et des classes d’âge.

L’on pourrait s’étonner du faible nombre de femmes représentées dans cette étude. C’est pourtant le reflet de la pratique du surf en Bretagne, qui reste très masculine, même si l’on voit de plus en plus de filles venir surfer les vagues bretonnes.

III. Résultats, comparaison avec la littérature et discussion :

Le but de cette étude était de valider certaines hypothèses et de confronter nos résultats à ceux publiés dans la littérature.

Les articles concernant les exostoses du CAE chez les surfeurs sont nombreux et des études ont été réalisées dans différentes régions du globe : Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Espagne, USA.

En France, une thèse de médecine générale réalisée à Bordeaux, en 1984, a cherché à connaître la prévalence des exostoses chez des surfeurs aquitains.

En Bretagne, le surf est plus jeune et les problèmes de santé chez les surfeurs sont un sujet nouveau.

A. Epidémiologie :

1. Prévalence des exostoses :

Dans cette étude réalisée sur 81 surfeurs, 58 sur 81 sont atteints d’exostoses du CAE, soit une prévalence de 71,6%.

Le tableau suivant répertorie les prévalences des exostoses chez les surfeurs dans différentes régions du monde. Voir thèse.

A la lecture de ce tableau, l’on s’aperçoit que la prévalence que l’on a trouvée est très proche des autres prévalences. Excepté, le groupe de surfeurs examinés par KROON, pratiquant leur sport dans les eaux chaudes de la Floride. Les différences avec les autres groupes de surfeurs sont minimes et peuvent s’expliquer par des températures d’eau différentes ou une fréquence et des périodes d’exposition différentes.

2. Répartition en fonction du degré de sténose :

Les exostoses ont été classées par leur niveau de sténose en 4 groupes distincts. Quand pour un surfeur, il existait une asymétrie de la présentation des exostoses, nous prenions en compte le CAE le plus atteint.

HURST (50) trouve que 44% de ses surfeurs atteints d’exostoses ont des CAE sténosés à plus de 66%. GUERIN (43) trouve que 62% des surfeurs atteints d’exostoses ont des lésions obstruant leur CAE à plus de 50%. Dans notre étude, 45% des surfeurs ont des sténoses à plus de 50%. Nous trouvons les mêmes résultats que nos collègues basques (4).

KROON (59), dans des eaux plus chaudes, trouva seulement que 31% de ces surfeurs ont des sténoses à plus de 33%. Surfer en eau chaude permet de réduire le risque d’être atteint d’exostoses et réduit également le risque d’avoir des lésions sévères.

3. L’âge :

L’âge moyen des sujets atteints d’exostoses de notre série est de 27 ans allant 15 ans à 47 ans.

Nous avons appris précédemment que le tympanal finissait sa croissance à la fin de la première décade. L’anneau tympanique de la naissance à la dixième année croit latéralement.

Cette croissance tardive, fait penser qu’à l’adolescence l’os est encore plus instable et qu’il peut être encore plus sensible aux éléments extérieurs. Dans ce cas, les exostoses seraient fréquentes avant 15 ans. Il est intéressant de comparer les prévalences des exostoses des surfeurs en fonction de leur âge. Voir thèse.

Les moins de 15 ans ne sont que 9, le nombre moyen d’années surfées n’est que de 3. La prévalence d’exostoses dans ce groupe est donc faible (22,2%). On ne peut savoir, si le fait de débuter le surf avant la fin la croissance de l’os tympanal est prédictif d’une apparition des exostoses. On peut citer le cas d’un enfant de 10 ans ½ qui surfe depuis l’âge de 4 ans ½, avec une fréquence élevée (>200 jours de surf par an), qui n’est pas atteint d’exostoses.

Le groupe 16~20 ans ne surfe en moyenne que depuis 6 ans et demi, on pourrait s’attendre à ce que la prévalence des exostoses soit faible. Pourtant celle-ci est de 68,8%. On peut expliquer cela par le fait que les surfeurs de cet âge sont très actifs et surfent énormément (11 sur 16 surfent plus de 100 jours par an).

Inversement, le groupe plus de 35 ans surfe depuis plus de 13 ans en moyenne et pourtant la prévalence des exostoses n’est que de 62,5%. Ces surfeurs sont moins présents sur leur planche, ce qui explique une prévalence plus faible.

4. Le sexe :

Dans notre échantillon, il n’y a seulement que 7 femmes sur 81 surfeurs, soit 8,64%.

3 surfeuses sur 7 sont atteintes d’exostoses soit 42, 86%. Chez les hommes la prévalence est de 74,3% (55 atteints sur 74 surfeurs).

La littérature nous apprend que les hommes sont plus atteints que les femmes (28, 49).

Cependant, il est difficile de préciser si il existe une prédisposition masculine à développer des exostoses ou au contraire si il existe un facteur de protection féminin. D’autant plus que hommes et femmes ont des habitudes de vie différentes : l’exploitation des ressources maritimes et la pratique de sports nautiques sont essentiellement masculines.

La plus grande étude statistique comparant les exostoses chez les surfeurs et chez les surfeuses a été réalisée par HURST (49), en Australie, en 2004. Au total, 229 hommes et 71 femmes furent interrogés et examinés. L’auteur insiste sur le fait que le surf est un sport beaucoup moins pratiqué par les femmes, même si, elles s’y intéressent de plus en plus. Dans son étude, les surfeuses ont en moyenne 25 ans et surfent depuis 10 ans, alors que les hommes ont 33 ans en moyenne et surfent depuis 20 ans. Le surfeur, après 20 ans de pratique, a une chance sur deux de développer une exostose sévère, alors que pour la femme, ce risque est de 3 sur 7. Cependant, quel que soit le sexe, la sévérité des lésions est corrélée au temps passé à surfer.

Sur notre petit échantillon de surfeuses, on constate une corrélation entre la sévérité des lésions et le temps passé dans l’eau.

Les 4 surfeuses qui n’ont pas d’exostoses ont surfé moins de 5 ans, seulement l’été et moins de 100 jours par an.

Les deux autres surfeuses qui ont une exostose unilatérale estimée à 25%, surfent également depuis moins de 5 ans, mais elles surfent plus souvent (101-200 jours par an) et elles surfent toute l’année.

La surfeuse atteinte d’exostoses bilatérales sténosant ses CAE entre 25 et 50%, surfe depuis 8 ans, 101 à 200 jours par an, toute l’année.

Ce petit échantillon fait suggérer le fait que les femmes, si elles pratiquent régulièrement le surf et depuis plusieurs années, sont susceptibles de développer des exostoses. Ici aussi, on remarque cette corrélation entre le temps passé dans l’eau et la sévérité des lésions d’exostoses.

Le surf est de plus en plus pratiqué par les femmes, les planches sont plus grandes, plus légères et plus faciles ; les combinaisons de plus en plus résistantes au froid ; la beach culture est de plus en plus en présente parallèlement aux loisirs qui prennent de plus en plus de place dans notre société.

B. Facteurs influents sur les exostoses :

1. Période moyenne d’exposition : voir thèse .

2. Saison surfée :

9 surfeurs sur 81 surfent seulement l’été soit 11,11%. Parmi ces 9 surfeurs 3 sont des hommes et 6 sont des femmes.

On ne retrouve pas ou peu d’exostoses (<25% de sténose) chez 7 surfeurs sur ces 9 surfeurs ne pratiquant que l’été.

Un des deux surfeurs surfant l’été, depuis 3 ans, ayant des exostoses bilatérales, sténosant les CAE entre 50% et 75%, a une histoire de chasse sous-marine depuis plus de 15 ans.

L’autre surf depuis 10 ans, moins de 50 jours par an, et est atteint d’une exostose asymétrique (< 25% à droite et entre 50~75% à gauche).

La période moyenne de pratique de surf dans ce groupe est de 4 ans, 5 surfeurs sur 9 glissent moins de 20 jours par an. Dans ce groupe, la faible exposition à l’eau explique la faible prévalence des exostoses (33%). Ce groupe n’est pas assez représentatif pour le comparer au groupe surfant toute l’année.

L’eau étant plus chaude l’été (18°) que l’hiver (10°), l’on peut s’attendre à ce que les surfeurs d’hiver soient plus atteints que les surfeurs pratiquant uniquement l’été.

3. Nombre de jours surfés par an : voir thèse.

C. Clinique :

1. Les signes fonctionnels :

La littérature nous apprend que ce sont les signes fonctionnels tels que l’hypoacousie, les otites à répétition, les otalgies qui décident de l’intervention chirurgicale. Si ils deviennent très gênants, avec un retentissement sur la qualité de vie des patients ou si ils sont non contrôlables par les traitements médicamenteux ; l’intervention est inévitable.

Selon les études, les otites sont présentes dans 52 (59) à 66% des cas (95). Les hypoacousie sont retrouvées dans 17 (85) à 60% des cas (96).

GUERIN (43), dans sa thèse, ne retrouve pas de corrélation entre la sévérité des lésions et la présence de signes fonctionnels.

Dans notre étude les symptômes se répartissent comme ceci : voir thèse.

A la lecture de ce tableau, on peut dire que les symptômes otologiques sont finalement peu spécifiques des exostoses, chez les surfeurs, puisqu’on les retrouve aussi bien chez ceux qui sont atteints d’exostoses que ceux qui ne le sont pas. Pour les otites externes, il existe une différence significative : les porteurs d’exostoses sont plus atteints d’otites externes que les sujets sains.

2. Latéralité des lésions :

Les définitions des exostoses dans la littérature nous apprennent que les exostoses sont des lésions symétriques et bilatérales (28, 51, 60, 62, 85, 95, 100).

DI BARTOLOMEO (28) retrouve seulement 4 cas d’exostoses unilatérales sur 70. Dans sa série, SHEEHY (89) retrouve seulement 3 maladies unilatérales sur 61 exostoses.

UMEDA (97) et HURST (50) trouvent que l’oreille droite de leurs surfeurs est plus atteinte que l’oreille gauche, du fait de l’orientation du vent sur les spots de surf.

Dans son étude GUERIN (43) montre que 57% des surfeurs examinés ont des exostoses symétriques et bilatérales.

Dans notre étude, le cas le plus fréquent est une exostose symétrique et bilatérale. 37 surfeurs sur 58, soit 63% ont une exostose symétrique et bilatérale.

Les 3 écarts de plus de 75% sont expliqués par des chirurgies unilatérales sur exostoses bilatérales et symétriques avant l’opération.

Dans notre étude, nous retrouvons seulement 5 cas d’exostoses unilatérales sur 58. Pour ces 5 cas d’exostoses unilatérales, l’oreille atteinte n’est obstruée qu’à 25% par l’exostose.

D. La prévention :

1. Le port de cagoules ou d’embouts auriculaires :

Nous l’avons vu précédemment, de nombreux auteurs (28, 74, 83, 97) recommandent le port de cagoules ou d’embouts auriculaires pour prévenir l’apparition des exostoses ou pour freiner leur développement. Ces moyens de protection agissent en évitant le contact de l’eau froide avec le CAE osseux.

Ces mesures doivent être associées au port du bonnet après la session pour réchauffer les oreilles et à un rinçage du CAE à l’eau douce et tiède.

Il était intéressant de connaître sur ces 81 surfeurs bretons combien d’entre eux portaient ces moyens de protections (cagoules et embouts auriculaires) et d’évaluer leur efficacité.

Comment sont utilisés ces moyens de protection :

Dans notre étude 4 femmes sur 7 soit 57% et 36 hommes sur 74 soit 48% les utilisent.

Au total, un surfeur sur deux utilise des moyens de protections.

Dans ce groupe de 40 surfeurs, 5 utilisent des embouts auriculaires seuls, 21 utilisent des cagoules seules et 14 utilisent les deux moyens de protections.

L’âge moyen de ces 40 surfeurs est de 25,5 ans, allant de 11 à 43 ans. Le nombre d’années surfées moyen est de 9,3 ans.

Dans ce groupe, 19 utilisent des embouts auriculaires, depuis en moyenne 1,8 an et 6 sur 19 les portent plus de 50% du temps.

Dans ce groupe, 35 surfeurs portent des cagoules, depuis en moyenne 3,2 ans et 4 sur 35 l’utilisent plus de 50% du temps.

Parmi ces 40 surfeurs : 11 n’ont pas d’exostoses, 18 ont des exostoses sténosant à moins de 50% le CAE et 11 ont des exostoses obstruant le CAE à plus de 50%.

Pour connaître l’efficacité des moyens de prévention, il est intéressant de comparer deux groupes : le groupe 1 qui utilise des moyens de protections (40 surfeurs) ; le groupe 2 qui n’utilise pas de moyens de protections (41 surfeurs).

Voir thèse .

Dans cette étude, nous ne mettons pas en évidence l’efficacité des embouts auriculaires ou de la cagoule pour prévenir l’apparition des exostoses et freiner leur développement.

Les deux groupes avec et sans protections auriculaires sont sensiblement les mêmes : âge et nombre d’années surfées équivalents. Les échantillons diffèrent sur ce point, le groupe avec protections surfe plus souvent : 29 surfent plus de 101 jours contre 19 pour l’autre groupe.

Malgré le port de cagoules ou d’embouts auriculaires les prévalences d’exostoses dans les deux groupes sont les mêmes, un peu plus élevée pour le groupe avec protection. De plus la sévérité des lésions est la même dans les deux groupes.

Donc dans cette étude, le port de la cagoule ou des embouts auriculaires ne prévient pas le développement des exostoses du CAE.

Le constat est le même quand on étudie le groupe port d’embouts seuls ou port d’embouts avec cagoule, soit 19 surfeurs au total. La prévalence d’exostoses dans ce groupe est de 84%.

Une explication peut être donnée à ces résultats : les moyens de prévention tels que le port de la cagoule et/ou des embouts auriculaires sont insuffisamment portés. Il existe un problème d’information.

Les embouts auriculaires sont en moyenne portés par un surfeur sur 4. Ils sont 19 à les utiliser.

Ces 19 surfeurs ont 26,5 ans en moyenne, surfent depuis plus 10 ans en moyenne, mais n’utilisent leurs embouts que depuis 1,8 an en moyenne, allant de 6 mois à 6 ans voire tableau suivant.

L’utilisation des embouts auriculaires est finalement très récente, moins de 2 ans en moyenne.

On peut attribuer ce nouvel engouement par des communications au travers d’articles et de livres traitant des exostoses, de la commercialisation dans les surf shop des embouts Doc’ Proplugs et enfin du bouche à oreilles entre surfeurs !

Pour ces 19 surfeurs, les embouts sont insuffisamment portés, seulement 6 sur 19 soit 31,5% les porte plus de 50% du temps.

Souvent les surfeurs qui ont porté ces embouts parlent d’une baisse subjective de l’audition, d’un inconfort, d’un déséquilibre. Sensation rencontrée également avec le port de la cagoule.

Le port de ces moyens de protections est avant tout motivé soit par l’apparition de signes fonctionnels, soit par la mise en évidence d’exostoses ou soit par leur traitement chirurgical.

Il faudrait également que l’information passe par les centres de la Fédération Française de Surf, dans les écoles de surf, en médecine sportive et générale.

2. Soins après la session de surf :

Attitude après une session de surf :

Rien : 37 surfeurs.

Rinçage à l’eau tiède : 39 surfeurs.

Instillation de gouttes auriculaires : 4 surfeurs

Nettoyage au coton tige : 11 surfeurs.

Ces moyens de préventions découlent des facteurs induisant des exostoses. Il faut lutter contre le froid et le vent. Il faut éviter également l’utilisation des cotons-tiges qui lèsent la peau du CAE et peuvent entraîner des impactions de cérumen et une hypoacousie de transmission. Le rinçage à l’eau douce et tiède, au cours d’une douche est utilisé par un surfeur sur 2.

CONCLUSION

L’eau froide est reconnue, actuellement, comme étant le facteur étiologique principal des exostoses du CAE. Les études anthropologiques, expérimentales et cliniques le prouvent.

De ce fait, les surfeurs qui passent de longues heures dans l’eau sont particulièrement exposés. Dans notre étude, 58 des 81 surfeurs examinés sont atteints d’exostoses soit une prévalence de 71.6%. L’incidence de cette pathologie est 0.63%. Les exostoses sont si fréquentes chez les surfeurs qu’elles sont appellées oreilles de surfeurs.

Elles touchent une population jeune (âge moyen : 27 ans dans notre étude) et masculine.

La croissance des exostoses est lente et progressive. Chez les surfeurs, elles apparaissent en moyenne après 5 à 12 ans de pratique. Plus le surfeur passe du temps dans l’eau, plus le risque de développer des exostoses est grand. Ainsi, dans notre étude, le risque pour un surfeur d’avoir un CAE sténosé à plus de 50% est de 1 sur 10 lorsqu’il glisse depuis moins de 5 ans ; ce risque est de 7 sur 10 quand il surfe depuis plus de 16 ans.

Les exostoses sont des lésions bilatérales et symétriques, 63% dans notre étude. Plusieurs exostoses peuvent se développer sur un même CAE, allant jusqu’à réaliser parfois une sténose complète du CAE (hyperostose). Ainsi, les exostoses du CAE réalisent une protection pour le reste de l’oreille. Le tympan se retrouve protégé par un CAE très étroit du froid et surtout des barotraumatismes, comme les tympans des mammifères marins.

Les exostoses se situent en général, en profondeur dans le CAE, au niveau des sutures du tympanal, là où le revêtement cutané est très mince.

Histologiquement, les exostoses sont constituées de couches concentriques d’os sous-périosté.

Elles doivent être distinguées des ostéomes, qui sont aussi des tumeurs bénignes du CAE. Les ostéomes sont moins fréquents que les exostoses et sont uniques, unilatéraux, se situant au niveau de la jonction ostéo-cartilagineuse du CAE. Au microscope, l’os est désorganisé et très vascularisé.

Les exostoses sont habituellement asymptomatiques et leur découverte souvent fortuite.

Cependant, quand la sténose du CAE est importante, il peut classiquement apparaître une hypoacousie de transmission, des otites externes, des otalgies, des acouphènes. Si ces signes fonctionnels ne sont pas contrôlables par le traitement médicamenteux, une chirurgie d’alésage est nécessaire.

Un scanner est demandé avant toute chirurgie pour préciser l’étendue des lésions et les rapports anatomiques des exostoses. Les voies rétro-auriculaires ou endaurales sont préférables pour une ablation complète des lésions. Une bonne habitude de la chirurgie otologique permet d’éviter les dangers opératoires habituels : perforation tympanique, déchirure du lambeau tympano-méatal, labyrinthisation, lésion du nerf facial, effraction de l’ATM.

En général la chirurgie soulage les patients de leurs symptômes. Le temps de cicatrisation moyen est de 6 semaines et la reprise des activités aquatiques est autorisée à 3 mois de l’opération. Dans notre étude, 3 de nos 81 sujets ont été opérés.

Pour éviter les désagréments de cette chirurgie, il convient de mettre l’accent sur la prévention. Après immersion du CAE dans de l’eau froide, il faut le rincer à l’eau douce et tiède pour réchauffer les téguments. Il faut éviter les cotons-tiges qui lèsent la peau très fine du CAE. Un suivi annuel, par leurs médecins généralistes, des surfeurs est souhaitable avec réalisation d’un examen otoscopique. Des informations concernant les problèmes de santé des surfeurs pourraient être données dans les écoles de surf et à chaque surfeur prenant une licence à la Fédération Française de Surf. Il faut insister sur le port des embouts auriculaires et des cagoules en hiver qui sont efficaces et semblent retarder l’apparition ou freiner l’évolution des exostoses. Notre étude n’a pu vérifier leur efficacité car ceux qui les utilisent, ne les portent que 50% de leur temps de surf et seulement depuis 2 ans alors qu’il surfent depuis 10 ans en moyenne.

Il serait intéressant, dans le cadre d’une autre thèse concernant la prévention des exostoses, de réaliser une étude comparative entre les surfeurs qui ne portent jamais d’embouts et ce qui en ont toujours porté.

Lire la version intégrale de la thèse .

Plus d’infos sur l’auteur de la thèse :

Le Docteur Eric Gilbart auteur d'une thèse sur l'exostose des surfeurs. Photo DR

Eric GILBART est né le 16/11/1977 à VANNES.
Il a effectué ses études de médecine à Rennes, débutées en 1995. Internat réalisé à VANNES. Eric a été thésé en 2008.
Adepte de la voile et du windsurf depuis l’enfance, il s’est mis au surf à 20 ans, après avoir utilisé son flotteur de planche comme surf dans des petites vagues, un jour sans vent.
Il pratique le Longboard, 9′, sur des vagues de plage à l’entrée de la presqu’île de Quiberon, dans le Morbihan.
Atteint d’exostoses modérées, il a décidé de réaliser sa thèse sur ce sujet et d’examiner ses collègues surfeurs.

A propos de l'auteur :

Surf Prevention est le site sur le Surf, la Sécurité, la Santé et l'Environnement.

 

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2 Commentaires

  1. Le livre Surfers' Survival Guide est même cité dans la bibliographie pour son chapitre sur l'oreille du surfeur !

  2. Olivier dit :

    Bonjour,

    L'article est très intéressant.

    Et il n'y a pas que les surfeurs qui sont concernés.

    Je plonge à Quiberon tous les étés en apnée depuis près de 20 ans (chasse et pêche sous-marine). Et je me baigne régulièrement d'Avril à Octobre en piscine extérieure non chauffée.

    J'ai été opéré il y a 4 semaines : exérese d'une exostose polylobée cirulaire à l'oreille gauche).

    Avant l'opération la sténose était fortement obstructive. Diamètre du CAE réduit à 1,5 mm. Impossible pour une goutte d'eau de sortir du conduit … mais aucun problème pour y rentrer avec la pression à partir de 1 à 2 m de profondeur sous l'eau.

    L'oreille droite est un peu moins atteinte. Je pense me faire opérer l'hiver prochain ou le suivant.

    J'ai lu que l'exostose pouvait revenir rapidement, les mêmes causes produisant les mêmes effets.

    J'aimerai continuer à aller dans l'eau et me protéger.

    Les bouchons posent-ils un problème avec la pression ?

    Y-at-il quelque chose d'adapté à l'apnée ?

    J'ai lu aussi que les frottements peuvent stimuler la production osseuse. Par précaution, je n'utiliserai plus de cotton tige pour nettoyer vigoureusement mon conduit.

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