Teahupoo est-elle victime de son succès ? On peut le redouter… Après la fameuse session du « Code Red » du mois d’août 2011, la vague située « à la fin de la route », est devenue the place to be pour se faire photographier dans les vagues les plus grosses; non pas les plus hautes en taille, mais les plus puissantes, les plus épaisses et les plus tubulaires de la planète. Ces images valent de l’or pour les médias friands de séquences toujours plus spectaculaires, et forcément, dès que les conditions sont réunies pour une houle historique, c’est la ruée vers Tahiti pour tout ce que le monde compte de big wave riders.

Sur la session hallucinante du lundi 13 Mai 2013 et celle du lendemain, il semble que l’on ait atteint la limite en termes de surpopulation du spot avec les équipages de tow-in en jet-ski.

Chacun veut être lancé sur la plus grosse vague, et c’est la guerre pour être le mieux positionné quand la big one arrive. A ce petit jeu, c’est le vétéran Laid Hamilton, habitué de la foule à Jaws, qui a su tirer son épingle du jeu, et lancer le jeune Koa Rothman sur une vague béante (vidéo Youtube).

En tow-in, la priorité ne se joue pas à la rame, mais avec des engins motorisés de plus de 400 kg qui ont déjà failli conduire au drame à Teahupoo.

Pour la première fois, des surfeurs ont exprimé leur ressenti sur cette situation extrêmement tendue qui augmente encore les risques d’accident dans ces conditions extrêmes.

Alain Riou qui a pris la plus grosse vague le mardi a également été héroïque en sauvant la vie de Benjamin Sanchis qui avait perdu connaissance suite à un traumatisme crânien sur le reef sur un wipeout. Sur les causes de cet accident, Alain Riou a déclaré à Magic Seaweed: “J’ai tracté Sancho trop deep à cause du monde. Nous attendions cette vague depuis un long moment et au moment de partir, un autre jet-ski s’est mis en travers de notre route, j’ai dû ralentir pour le contourner et nous avons fini trop à l’intérieur malgré le fait que j’avais mis les gaz. (…) Mardi était différent de lundi mais toujours très solide. Les vagues n’étaient pas aussi fréquentes que la veille, ce qui rendait la bataille entre jet-skis encore plus rude – et c’était sacrément gros. (…) C’était tellement dangereux et stressant. Trop de personnes qui voulaient trop de vagues – personne n’attendait son tour, c’était par moments une totale bataille de chiens. Je n’étais pas là pour le Code Red et je n’étais pas revenu à Tahiti pour un gros swell depuis quelques années, mais je ne pense pas que cela ait déjà été aussi bondé auparavant. »

Hira Teriinatoofa déclare dans la Dépêche de Tahiti: « C’est la folie sur le spot. Au pic, nous sommes autant de Tahitiens que d’étrangers. Tout le monde veut évidemment prendre la plus grosse, et du coup c’est un peu l’anarchie. Quand on se respecte les uns les autres, c’est chacun son tour. Mais, des fois, cela ne se passe pas comme cela. Quand c’est l’accalmie, on se parle et on décide de qui va partir sur la prochaine. Et puis quand la vague arrive, on se retrouve à trois dessus et personne ne veut laisser passer son tour. Cela devient trop risqué parfois, donc je préfère attendre que cela se calme et je retourne au bateau. »

Garrett McNamara avait déclaré lundi: « Grâce à Dieu, il n’y a pas eu de blessures sévères. C’était la folie dans la passe avec les bateaux qui se rentraient dedans, qui manquaient se faire happer par une vague avec des types qui tombaient des embarcations et qui nageaient pour leur vie. On n’est pas passé loin de la catastrophe à plusieurs reprises. » Comme on peut le voir sur la vidéo Vimeo, plusieurs personnes sont tombées à l’eau après que le pilote d’un bateau ait tenté de passer par-dessus une vague avec comme seule victime une caméra RED

La photo publiée sur Tahitian Xtrem montre bien les coulisses de l’exploit à Teahupoo. Les réactions des internautes à cette photo sur Facebook sont intéressantes: « Le cirque... », « Est-ce encore du surf ?« , « Si tu ne peux pas la prendre à la rame, alors tu ne la prends pas.« …

On ne parle même pas de la pollution occasionnée par l’utilisation de tous ces jet-skis qui ne tournent pas au biocarburant…

 

A propos de l'auteur :

Surf Prevention est le site sur le Surf, la Sécurité, la Santé et l'Environnement.

 

Tags: , , , , , ,

 

14 Commentaires

  1. Colin dit :

    Article intéressant, cependant attention à la note de fin : « On ne parle même pas de la pollution occasionnée par l’utilisation de tous ces jet-skis qui ne tournent pas au biocarburant… »
    Quand bien même ils tourneraient aux biocarburants, cela ne serait pas moins polluant. Les biocarburants ont un impact environnemental qui s’avère souvent pire que l’essence : déforestation, utilisation d’engrais et pesticides, pollution de l’eau et des sols, émission d’N2O, etc.

    • J-C dit :

      Oui et l’utilisation de bio carburant est pour l’instant intolérable tant que près d’un milliard de personnes souffriront de malnutrition.

      Sinon, comme toujours, bravo pour vos articles intelligents et très riches.

  2. geers franck dit :

    ce sont peut etre de bons surfeurs mais j ai du mal me retenir quand je lis ce genre d article, ces gars n ont absolument rien a voir avec l esprit surf de nos anciens,qui pronaient le plaisir et surtout le partage, mot qui n a plus aucun sens de nos jours malheureusement.
    eliminez les cameras et les appareils photos, disparetra ainsi l ego surdimentionner de ces types la,ainsi que le nombre de personnes au pic !!!
    allz aloha tout de meme….

  3. amsm dit :

    vision d’apocalypse et sans doute le début de la fin car à ce rythme il va y avoir des morts, de la pollution au mazout et des bateaux et des jets enchâssés dans le reef!
    A ce stade c’est de la folie collective ou de la barbarie digne d’une curie d’orques sur un banc de manchots!
    Aloha signifie quoi déjà?
    L’an prochain on aura la même à Belhara… et bientôt ça sera payant avec liste d’attente et équipage imposé comme sur l’Everest!
    Cette vidéo montrant la face cachée des clichés est un traumatisme qui hantera mon regard sur les incroyables clichés de ce genre de session.

  4. Steph dit :

    Y’a la sécu, aussi, qui en prend un coup!

    Je viens de lire dans « stabmag » l’interview d’un surfeur hawaïen qui se glorifie, après avoir subi une intervention chirurgicale à Tahiti, de s’être tiré de l’hosto sans l’accord des toubibs, qu’il traite affectueusement de termes que j’éviterais d’employer ici…
    Même les lecteurs australos de stabmag trouvaient le procédé minable (ils ‘ont toujours pas compris que Tahiti était en France, sinon, ils n’auraient peut être pas été si virulents!). Leurs commentaires ont donc tous été effacé du site…qui minimise et nous explique que les termes employés étaient affectueux…Mais quid de la note d’hosto?

    Quant à moi, je m’avoue ravi de participer au financement des soins de ce monsieur, altruiste, généreux et manifestement d’une distinction peu commune. Chouette endroit, si bien fréquenté!

    • Pas cool du tout en effet pour les soignants et les structures hospitalières qui l’ont pris en charge sur Tahiti.

      http://stabmag.com/can-you-please-put-my-lip-back-on/

      C’est la description de tout ce qu’il ne faut pas faire avant et après une intervention: pas à jeûn, perf’ arrachée, sortie contre avis médical une heure après le réveil de l’anesthésie, « haut comme un kite » comme il dit… Tout ça pour prendre un avion en urgence et aller consulter son chirurgien à Los Angeles qui lui dit que l’opération a été réalisée à la perfection (ce qui a l’air de le surprendre: « j’ai dû tomber sur le meilleur chirurgien de tout Tahiti »).

      Les Américains confondent parfois les DOM-TOM avec le quart-monde (comme ce grand spécialiste des requins qui disait qu’on mourait plus souvent d’attaque de requin à La Réunion faute de prise en charge médicale adaptée…)

      • Terry dit :

        J’ai raté un truc ou à aucun moment il ne remercie ceux qui l’ont soigné ?
        C’est triste de voir ce genre de surfeur être mis en avant, avec un interviewer qui lui lèche les bottes du début à la fin…
        J’espère que les Tahitiens se souviendront de son comportement déplorable à son prochain séjour chez eux…

  5. amsm dit :

    Une question très bête et liberticide:
    La navigation n’est-elle pas interdite à tout type d’embarcation en cas de CODE RED par le code de l’environnement de la Polynésie?
    http://www.environnement.pf/IMG/pdf/code_env_30-11-06.pdf

    Qui serait responsable de la noyade des photographes tombés à l’eau ou des surfeurs lors d’une collision en jetskis sous les caméras des sponsors et autres médias commanditaires?

    Qui serait responsable de la pollution au mazout si un bateau venait à se faire exploser sur le reef par une vague qui décale?

    Que pense les tahitiens de ce genre de cirque qui les exposeront aux dégâts écologiques et d’images très longtemps après le départ de tout ce petit monde motorisé vers d’autres vagues à l’heure ou la Polynésie vient d’être classée par l’ONU comme « Territoire à décoloniser »?

    Une régulation à la Népalaise ne devrait pas tarder à surgir…

  6. Le surfeur normand dit :

    Quel cirque !
    Ah la belle image donnée au surf !
    Vive la régulation pour canaliser ces gamins du surf business!

  7. Drakkars dit :

    Au vu de la vidéo ci-dessus, y’a vraiment des cons.
    Il va falloir interdire les sorties des bateaux à touriste dans de telles conditions.
    Heureusement que ceux qui sont tombés à l’eau savaient nager.
    C’est sur qu’à ce rythme, il finiras par y avoir des morts !!!!

  8. yoo972 dit :

    codered ne veut pas dire « pas de sortie en mer » ? plus c gros plus y a du monde, le jour où il y a un mort le code red sera effecivement applicable à la lettre, d’autant qu’on a plus besoin de faire de la pub pour ce spot de bout du monde à l’heure qu’il est…

  9. Rodolphe dit :

    Hé oui c’est cela la médiatisation !!!!’ Du monde , la foule avec un abêtissement de la masse et ds comportements débiles . Vous savez y a pas besoin d’aller à Tahiti , à laffite vous voyez fréquemment 70 personnes au pet et cela ne décourage visiblement pas ceux qui arrivent , 70 personnes c’est pas grave j’enfile moi aussi la combarde et hop à l’eau ( comment peut prendre du plaisir ) !!

    Allez il parait qu’il faut être positif !!!!

Laisser un commentaire