Teahupoo : Maya Gabeira évite de peu la noyade lors de la session tow-in

Il s’est passé beaucoup de choses ces derniers jours à Teahupoo et il nous faudra des semaines pour digérer et analyser le flot d’informations qui nous est parvenu en un laps de temps très court. Revenons déjà sur cette session énorme du samedi 27 août 2011 à Teahupoo. Alors que la plupart des surfeurs professionnels avaient sagement décidé de rester au sec, les mercenaires du surf tracté avaient fait le déplacement pour profiter de ce qui fut peut-être la plus grosse houle ayant frappé le reef de Teahupoo ces dernières années. Parmi eux, il y avait une certaine Maya Gabeira, qui a bien failli y laisser la vie…

Remettons la session dans le contexte : comme prévu, une houle gigantesque, trop grosse pour être surfée à la rame, est en place en ce samedi. Les autorités tahitiennes ont émis une alerte rouge qui implique que toute activité nautique et la mise à l’eau d’embarcations sont interdites. Les vagues font 6 voire 8 ou peut-être même 10 mètres sur les plus grosses séries. Personne n’était censé se mettre à l’eau ce jour-là. Et pourtant, bravant le danger et l’interdit, les équipes de tow-in et les photographes n’ont pas tardé à se mettre à l’eau. Que se serait-il passé en cas d’accident grave ou mortel au niveau des responsabilités ? Par chance, le pire n’est pas arrivé, mais la mort n’était pas loin entre les tonnes d’eau soulevées par les vagues et le récif implaquable de Teahupoo. Maya Gabeira a bien failli y vivre ses dernières heures.

Que lui est-il arrivé exactement ? Je n’ai pas encore reçu de réponse à l’interview que je lui ai envoyé par Facebook, mais en recoupant les différents témoignages, il semblerait que Maya Gabeira ait d’abord pris un terrible wipeout où elle est partie avec la vague comme dans une machine à laver géante. Elle s’est ensuite retrouvée coincée dans la zone d’impact où elle aurait pris l’une des plus grosses vagues de la journée sur la tête, suivie de plusieurs autres, sans trouver d’échappatoire et sans que la Water Patrol ne puisse l’atteindre. Par miracle, une accalmie est arrivée et Vetea David est finalement parti la secourir.

Il l’aurait récupérée sonnée « à demi-inconsciente » et en noyade de stade 2 au minimum (elle aurait inhalé de l’eau). Elle aurait subi un traumatisme crânien avec otorragie (saignement de l’oreille sur une lésion tympanique ?). L’IRM qu’elle a passé ensuite n’aurait pas montré de lésion. Elle a rassuré tout le monde sur Twitter mais s’est dite très fatiguée après ce sérieux accident.

Des surfeurs comme Shea Lopez se sont beaucoup inquiétés pour Maya Gabeira. Même Kelly Slater a fait savoir sur Twitter qu’il était très impressionné par ce qui venait d’arriver à Maya Gabeira. Une question n’a pas manqué de se poser sur les forums de surf : Maya Gabeira avait-elle sa place sur cette session de tow-in extrême ?

Signalons qu’il y avait une autre fille à l’eau ce jour-là : Keala Kennelly qui elle aussi a eu son lot de wipeout (elle avait quand même pris la précaution de mettre un casque pour surfer). Mais à la différence de Maya Gabeira, Keala est une ancienne surfeuse professionnelle. Elle a un niveau en surf et une lecture de vagues bien supérieurs à la surfeuse brésilienne. Et dans de telles vagues, c’est ce qui peut faire la différence entre la survie et le wipeout fatal.

Maya Gabeira est une belle jeune femme très courageuse, très motivée et qui s’entraîne constamment sur le plan physique et mental. Mais ces qualités ne peuvent remplacer les aptitudes et l’expérience en surf. Il arrive un moment où les exercices en salle avec un ballon ou sur une planche d’équilibre ne peuvent combler des lacunes en surf. Sur ses sessions de gros en surf tracté, il est déjà arrivé à Maya Gabeira de tomber très lourdement par manque de maîtrise technique, comme sur ce terrible wipeout à Teahupoo en 2007. Sur ses vagues, on la voit rarement assurée et on ne sent pas la maîtrise que possède la plupart de ses coéquipiers de surf tracté.

Elle a obtenu à plusieurs reprises le prix XXL de la part de son sponsor Billabong, qui sponsorisait justement le Billabong Pro Tahiti. Mais Maya n’a-t-elle pas largement dépassé ses propres limites ce jour-là ? Quand un Kelly Slater préfère s’abstenir (malgré toute son expérience dans le très gros surf), est-ce à une frêle jeune femme comme Maya Gabeira de se mettre à l’eau ?

Personnellement, je serai tenté de répondre que non. Sans aucun machisme ou misogynie, on peut dire qu’il n’est pas raisonnable d’envoyer une surfeuse au casse-pipe dans ces conditions inhumaines pour faire du sensationnel pour une marque de surfwear ou pour une boisson énergisante qui donne des ailes… Parce qu’à ce rythme-là, il arrivera un jour ou l’autre un accident grave à l’un de ces tow surfeurs qui ne connaissent plus de limite. Et je n’ai aucune envie que ce soit Maya Gabeira qui soit la prochaine victime sur la liste des surfeurs morts dans de trop grosses vagues…

Image : copyright Joli.