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Que nous réserve la Cité du Surf à Biarritz ?

Pour ceux qui ne le savent pas encore, Biarritz aura prochainement sa Cité du Surf , sensée attirer des centaines de milliers de visiteurs chaque année.

Les travaux ont déjà commencé…

Après avoir été très enthousiaste sur ce projet, j’avoue être de plus en plus sceptique.

D’abord parce que le nom de cette cité s’est progressivement modifié :

– La « Cité du Surf » s’est transformée en :
– « Cité du Surf et de l’Océan » puis en :
– « Cité de l’Océan et du surf »,
– et on parle maintenant de plus en plus souvent de « Cité de l’Océan » tout court…

Ce dérapage lexical ne m’inspire rien de bon pour le côté  » surf  » de cette Cité…

Pourtant le surf semble toujours faire partie intégrante du projet comme on peut le lire sur le site Internet de la Ville de Biarritz :

« Après la pêche à la baleine et les débuts des bains de mer, c’est le surf qui fait aujourd’hui partie du quotidien de Biarritz, de son image, de sa culture et de son économie. Ancré depuis plus de 40 ans dans la culture locale, le surf porte une image et un style de vie liés au respect de l’environnement et de l’océan. C’est donc élargie à la connaissance et à la préservation de la mer que la Cité du surf et de l’océan racontera l’histoire de cette activité, sa contribution à la vie sociale« .

Personne n’a encore su m’expliquer concrètement ce qu’il y aura à l’intérieur de cette fameuse cité.

On connaît l’enveloppe, magnifique, imaginée par Steven Holl Architects , l’un des plus gros cabinets d’architectes au monde, mais j’ose espérer qu’il ne s’agira pas d’une belle coquille vide…

Pour moi, une Cité du Surf attractive devrait être un genre de Futuroscope du Surf . Cela impliquerait qu’il y ait notamment dans cette Cité :
– au moins une piscine à vagues dernier cri utilisant les nouvelles technologies de vagues artificielles,
– des simulateurs de surf utilisant les jeux vidéos comme support (le côté ludique est capital pour attirer un public jeune).
– une médiathèque complète avec tout ce que le surf compte de films, de livres, de magazines,…dans le monde.
– un laboratoire pour élaborer des projets surf d’envergure avec participation de surfeurs, de spécialistes, d’ingénieurs… : expéditions / surf trips à visée scientifique (auxquels les correspondants médicaux de Surf Prevention seraient prêts à participer), mise en place de programmes environnementaux ambitieux pour l’océan,…
– un atelier de shape du 3e millénaire.
– la création d’une communauté internationale de surfeurs grâce à l’interface Internet.
– un espace pour des concerts évidemment, le surf étant intimement lié à la musique.

Malheureusement, j’ai bien peur de rêver tout haut car, d’après ce que j’ai pu entendre ici ou là, il devrait plutôt s’agir d’un Musée de la Mer « bis » ou d’une énième exposition sur l’océan (avec les jolis bateaux, les gentils poissons et la vilaine pollution…) et avec juste quelques vieilles planches des Tontons Surfeurs exposées dans un coin du Musée pour faire joli…

J’espère de tout mon coeur me tromper mais cette Cité me paraît déjà mal barrée pour plusieurs raisons :

Primo, la Cité du Surf n’est pas située sur un spot de surf. Déjà qu’on a du mal à rassembler les surfeurs au bord d’une plage, je doute qu’ils aient envie de squatter à un endroit d’où l’on apercevra à peine les vagues… (La Cité du Surf et de l’Océan sera construite à Ilbarritz, entre la RN10 et la mer, au-delà de la « bande des 300 mètres »).

Secundo, je ne suis par certain que les surfeurs biarrots aient été consultés sur ce projet qui les concerne au premier chef. Quand je dis surfeurs biarrots, je parle des surfeurs du Grande Plage Surf Club ou du Marbella Surf Club par exemple qui sont dans l’eau toute l’année.
En tout cas, je n’ai pas eu voix au chapitre : la seule fois que j’ai eu l’honneur de rencontrer le maire de Biarritz, il a coupé court à mon enthousiasme en m’annonçant texto que le surf ne serait qu’une « porte d’entrée de la Cité du Surf, et encore pas la plus importante… ». Un comble.

Quand je vois que les surfeurs de Biarritz sont parqués dans des locaux de seconde zone et qu’on risque de mettre des millions d’euros dans une Cité davantage destinée aux non surfeurs qu’aux surfeurs eux-mêmes, je m’interroge.

Pour remettre les choses dans leur contexte, il faut savoir que la politique locale orientée vers le tout-touristique fait des ravages. Biarritz est la seule ville du Pays Basque à avoir perdu des milliers d’habitants ces dernières années (selon le dernier recensement de l’INSEE) avec un parc de résidences secondaires qui représente aujourd’hui au moins 40% des habitations à Biarritz ! Le résultat est que Biarritz est maintenant devenue une ville-fantôme hors-saison. Quand on va surfer à Biarritz en hiver, on est choqué par tous les volets fermés des logements occupés quelques jours par an seulement.

Les jeunes, les familles, les surfeurs modestes ne peuvent plus se loger au centre-ville de Biarritz et sont condamnés à habiter dans un clapier, en périphérie, dans un logement social (s’ils y ont droit et s’ils en trouvent un, ce qui n’est pas gagné…) ou dans les communes avoisinantes. Les commerces ne travaillent plus que pendant les week-ends d’affluence et pendant les vacances.

Il y a de moins en moins de Biarrots vivant à l’année à Biarritz pour faire vivre et bouger la cité. La ville est donc obligée de faire des pieds et des mains pour attirer une clientèle de passage pour subsister. Dans ce contexte, le surf n’est qu’un faire-valoir, comme pour cette fameuse « Cité de l’Océan et du Surf » sur laquelle on colle une étiquette surf comme sur un simple « produit d’appel touristique ».

Il y aurait pourtant moyen de faire tout autre chose à Biarritz en impliquant davantage la jeunesse biarrote et en la faisant participer à un projet comme la Cité du Surf.

Biarritz ne demande qu’à se réveiller ! Les manifestations pour jeunes y remportent toujours un vif succès. En témoignent les réussites de la Scène de Musiques Actuelles de l’Atabal, du skatepark ou encore de l’affluence pour les concerts organisés en été.

Biarritz a su également préserver son identité comme le prouvent son patrimoine préservé et la résistance de la langue basque sur place.

Biarritz est aussi et surtout un formidable vivier de surfeurs, rassemblés au sein du Biarritz Associations Surf Club.

Il y a un énorme potentiel à Biarritz. Mais les grands événements surf se font rares. Loin de nous l’âge d’or des grandes compétitions internationales de surf qui voyaient les meilleurs surfeurs du monde s’affronter sur la Grande Plage de Biarritz : le Biarritz Surf Masters, le Reef Surf Trophée, le Biarritz Surf Festival sont partis aux oubliettes et n’ont pas été remplacés.

Je déplore que l’on n’ait jamais osé vraiment miser sur le surf. Même à Biarritz, « berceau européen du surf », on préfère mettre en avant l’image du rugby que celle du surf.

Quand on joue la carte surf, il faut mettre le paquet car les surfeurs représentent une « clientèle » très exigeante et ne sont pas dupes surtout si on essaie de leur placer une pseudo « Cité du Surf ». Si l’on veut éviter que ce projet ne soit un échec cuisant, il faut oser remettre le surf au centre du projet, y mettre les moyens et surtout solliciter les surfeurs du Pays Basque et d’ailleurs pour le développer.

J’ai toujours vécu à Biarritz, j’y travaille et j’y surfe. J’aime cette ville et je voudrais qu’un jour le surf y trouve la place qu’il mérite. La Cité du Surf est l’occasion rêvée pour rendre au surf à Biarritz ses lettres de noblesse mais attention de ne pas rater le virage, au risque de prendre une grosse gamelle !

Si la Cité du Surf n’est pas à la hauteur des mes espérances, je peux vous assurer que j’y mettrai les pieds aussi souvent qu’au Musée de la Mer (une fois tous les 10 ans en moyenne) et pourtant je pense être l’un des habitants de Biarritz les plus passionnés par le surf !

Pour résumer mon propos, je dirais :
Une Cité du Surf pour les surfeurs : Oui !
Un Musée de l’Océan uniquement pour distraire les vacanciers : Non !

Et vous, que pensez-vous d’une Cité du Surf ? Comment la voyez-vous ? Donnez votre avis en postant un commentaire.

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