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Les surfeurs de La Réunion injustement stigmatisés après les attaques de requins

A la veille de la réouverture des plages de Boucan Canot et des Roches Noires, les surfeurs de l’Ile de la Réunion ont les nerfs à vif. Meurtris par la disparition de leur camarade Mathieu Schiller, choqués par les commentaires anti-surfeurs qui ont fleuri sur Internet (du genre « si vous vous faites croquer par un requin, c’est de votre faute, vous n’aviez qu’à pas aller dans l’eau… »), écœurés par les propos de la présidente de Sea Shepherd France qui n’a pas hésité à leur attribuer la responsabilité des prélèvements de requins en les qualifiant de « honte pour la communauté surf mondiale », les surfeurs sont révoltés par l’infantilisation et la culpabilisation dont ils sont victimes.

En écoutant certains, on a l’impression que la vie d’un surfeur vaudrait moins que celle d’un requin bouledogue et que les surfeurs n’auraient même plus leur place dans l’environnement marin dans lequel ils évoluent, contraints de céder leur place au requin. Nous reviendrons dans un article plus détaillé sur les raisons qui font que le requin est devenu un animal sacré dans l’esprit du grand public. Mais il nous apparaît urgent de rappeler quelques éléments et de donner un avis avec un peu de recul sur les événements depuis la métropole.

Oui les surfeurs sont à leur place sur tous les océans du globe ! L’homme vient de la mer et les surfeurs se sont parfaitement intégrés à l’environnement marin en s’inscrivant comme de fervents défenseurs de la faune et du milieu. Leur dire qu’ils n’ont plus leur place sur des spots qu’ils ont fréquentés pendant des années sans anicroche sonne pour eux comme une provocation. Leur faire un procès en sorcellerie en les accusant de vouloir exterminer les requins pour leur plaisir personnel de glisser sur les vagues est particulièrement malhonnête. Ce ne sont pas les surfeurs qui ont pris la décision de l’opération de prélèvements mais le préfet. Mettre tous les surfeurs dans le même panier en utilisant les plus vils amalgames est indigne.

Ce qui a déclenché les réactions disproportionnées de la part de certaines associations de défense de l’environnement, c’est cette histoire de « prélèvements » de requins qui a été très mal explicitée en amont, malgré des efforts de clarification pendant l’intervention (cf vidéo Youtube).

Si le but de cette opération était de réguler une surpopulation de requins bouledogues ou tigres, on peut dire que c’est un échec total : un seul requin pêché en 3 jours dans la zone… Mais qu’on prélève 10 requins ou qu’on en prélève 100, le résultat sera le même. Cette solution n’est qu’un pis-aller pour rassurer les plagistes en donnant l’impression d’agir. Tuer des requins n’est pas la solution.

Ce qu’il faut bien comprendre, et que certains ont l’air d’avoir perdu de vue, c’est que les requins sont probablement attirés par des facteurs environnementaux dont Christophe Perry nous avait fait un inventaire précis sur Surf Prevention. Pour diminuer le risque d’attaque, il faudrait donc avant tout jouer sur ces facteurs environnementaux, même si les comprendre et les corriger sera autrement plus ardu qu’une « pêche préventive » expéditive et à l’intérêt discutable.

Une pêche préventive (dans le but de capturer un requin et non de le tuer) n’aurait d’intérêt éventuel que dans les minutes qui suivent une attaque, quand on a encore une chance de retrouver le requin-agresseur. Quand on lance cette pêche préventive plus d’une semaine après l’attaque, comme cela a été le cas ici, on peut être sûr que le requin en cause est déjà très loin. A moins qu’il ne s’agisse d’un requin sédentarisé, comme l’ont suggéré des pêcheurs locaux. Mais ne vaudrait-il pas mieux alors vérifier cette hypothèse avec des marquages de requins dans la zone avant de se lancer dans une telle pêche ?

L’intérêt de cette pêche unique d’un requin bouledogue de 2,44m pour 156 kg le 29 septembre 2011 aura été avant tout scientifique. C’est une première étape indispensable à une meilleure compréhension des événements. Car n’oublions pas que ces requins devenus inhabituellement agressifs dans une zone donnée pourraient très bien être malades ou intoxiqués par une pollution x ou y (métaux lourds, pesticides ou autre pollution chimique marine non identifiée). Quand un homme a des troubles du comportement pour une raison inexpliquée, on l’hospitalise et on lui fait passer des examens, quand un chien mord quelqu’un, il est placé en observation vétérinaire pour être sûr qu’il n’a pas la rage… Pour un requin, cela devrait être la même chose…sauf qu’il est difficile de prélever un requin bouledogue vivant et de lui demander de se tenir tranquille pendant que l’on pratique des analyses. Le requin capturé a été autopsié et ses organes seront analysés en métropole.

Nous parlerons dans l’article suivant des mesures effectives mises en place pour réduire le risque requin à La Réunion, même si on peut se demander si une réouverture des plages dès ce lundi n’est pas prématurée. L’association Océan Prévention Réunion a même réitéré sa mise en garde de « ne pas mettre un pied dans l’eau entre Boucan et Saint-Gilles » face à un danger « réel et permanent ».

Profitons de ce post pour lancer un appel au calme aux différents protagonistes directement concernés par cette affaire. Il est tout aussi excessif et lamentable pour des surfeurs de traiter tous les écolos de « bobos » ou de « fachos » que pour ces derniers de qualifier l’ensemble des surfeurs de « bande de froussards vindicatifs »… On peut très bien être surfeur et totalement écolo. Sur Surf Prevention, on considère que préserver l’environnement, c’est aussi se préoccuper de l’environnement humain et que cette logique est tout à fait compatible avec une vie en harmonie avec la nature et les animaux. Mais quand quelque chose perturbe cette cohabitation, on se doit d’essayer de comprendre ce qui se passe plutôt que de se dire que l’on ne peut rien y faire et que l’homme doit s’effacer devant l’animal…

Voir aussi : le groupe Facebook « Pour des excuses publiques de Lamya Essemlali aux surfers péi »

Une autre vision des choses par le surfeur Hugo Savalli.

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