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Prévention : faire du surf pour préserver ses articulations

« J’ai quitté le lit pour m’allonger sur le sol au milieu de la nuit. Je le fais presque toujours. C’est meilleur pour mon dos. Dormir trop longtemps sur un matelas moelleux me cause des douleurs insupportables. Je compte jusqu’à trois et entreprends la manoeuvre longue et difficile qui consiste à me mettre debout. Je tousse, je grogne, je me roule sur le côté puis me recroqueville en position foetale. Je bascule enfin pour m’allonger à plat ventre. Maintenant, j’attends patiemment que mon sang se remette à circuler. Je suis un homme relativement jeune, si l’on peut dire. J’ai 36 ans. Mais quand je m’éveille, j’ai l’impression d’en avoir quatre-vingt-seize. Après trente années passées à courir, à s’arrêter brutalement, à sauter très haut et à retomber durement au sol, mon corps n’est plus ce qu’il était, surtout le matin. Et mon esprit s’en ressent. »

Non ce n’est pas un vieillard perclus de rhumatismes qui parle… C’est le champion de tennis Andre Agassi qui écrit ces mots à la première page de son autobiographie intitulée « Open ». Le tennis est un sport merveilleux, mais pratiqué intensément pendant plusieurs années, il peut traumatiser l’organisme comme le décrit très bien ici Agassi. Agassi est pourtant un exemple de longévité dans son sport mais sa fin de carrière a été un véritable chemin de croix…

On s’intéresse depuis peu à la pénibilité de certains métiers et aux troubles musculo-squelettiques qu’ils peuvent engendrer. J’ose espérer que l’on se penchera très prochainement sur les sports qui sont le plus susceptibles de traumatiser les articulations des pratiquants, professionnels ou amateurs, quitte à froisser certaines fédérations sportives.

Quand on évoque des sports mettant à rude épreuve les articulations, on pense spontanément au rugby où les joueurs passent leur temps à courir sur un terrain dur et accidenté et à se rentrer dedans. Le corps se souvient de tous les chocs qu’il encaisse et pour certains rugbymen, cela peut se traduire par des douleurs chroniques, une raideur articulaire voire un handicap, en l’absence de tout traumatisme aigu (fracture, entorse…). C’est la répétition de microtraumatismes qui altère les articulations et peut donner de l’arthrose, notamment au niveau du rachis cervical chez le rugbyman (lire l’article*). Plus on se rapproche de la première ligne en rugby, plus les séquelles de la pratique peuvent être lourdes (cf. l’exemple de Raphael Ibanez qui a dû prendre une retraite anticipée). Mais en commençant le rugby, peu de jeunes joueurs – et encore moins leurs parents – savent qu’ils sont exposés à une dégénerescence précoce du rachis cervical aux conséquences potentiellement invalidantes pour la longue vie qui les attend après leur carrière de joueur…

Les médecins qui rédigent des certificats de non contre-indication à la pratique du rugby connaissent bien le problème et recherchent en priorité des signes cliniques de raideur, des douleurs au niveau du cou ou des signes neurologiques en rapport avec une myélopathie sur un canal cervical étroit (objectivé par un examen IRM). Mais il n’y a pas que le cou qui trinque chez les rugbymen qui passent leurs matchs à aller « au contact » aux dépens de leur intégrité physique sous les encouragements de leurs entraîneurs et les vivas du public…Les hanches et les genoux sont également à risque d’arthrose précoce chez les joueurs de rugby. Les joueurs disent parfois pour plaisanter qu’ils ne feront pas de beaux vieux…Je considère les rugbymen comme des gladiateurs qui mettent en jeu leur santé pour faire du spectacle. Mais les joueurs en ont-ils vraiment conscience avant que les premiers symptômes d’une usure précoce ne se fassent sentir ?

Je prends l’exemple caricatural du rugby mais on pourrait aussi parler de sports comme le football ou de sports de glisse comme le skateboard ou snowboard quand ils sont pratiqués de manière répétitive, intensive ou inadaptée. On devrait parler plus souvent de ces sports à risques pour les articulations quand ils sont pratiqués de manière trop intensive ou inadaptée. Je ne contre-indique pas ces sports mais je mets en garde les patients qui les pratiquent pour qu’ils gèrent au mieux leur préparation et l’intensité de leur pratique pour prévenir la survenue d’une arthrose précoce. Il existe aussi des facteurs de prédisposition individuels qui font que nous ne sommes pas égaux devant la survenue d’une arthrose. Plus que les sports en eux-mêmes, c’est souvent une façon inappropriée de les pratiquer qui est en cause dans la survenue d’une usure précoce des articulations.

Le surf dans des conditions « normales » de pratique est un sport moins traumatisant que le rugby ou le tennis : certains joueurs de tennis (exemple de Gustavo Kuerten) ou des rugbymen se tournent d’ailleurs  vers le surf (exemples de Jérôme Thion, Jean-Baptiste Gobelet, Trevor Hall…).

Par rapport à ces sports, le surf offre l’énorme avantage de pouvoir être pratiqué quasiment au même rythme pendant toute la vie. Le surf est un sport peu usant car les chocs sont amortis par la réception sur l’eau. La préparation d’un surfeur peut se limiter à une heure d’entraînement quotidien. Il lui est même possible de s’abstenir de surfer pendant plusieurs semaines par saison (comme le fait le champion du monde Kelly Slater). Ce rythme de préparation serait bien évidemment inenvisageable chez un tennisman ou un rugbyman qui se voit imposé d’énormes charges de travail quotidiennes avec musculation intensive, enchaînement de matchs, tout en pratiquant un sport autrement plus traumatisant que le surf…

Contrairement à d’autres sportifs, les surfeurs peuvent espérer continuer à surfer presque au même rythme pendant toute leur vie. La longévité des surfeurs sur la scène internationale en est l’illustration avec des champions comme Kelly Slater qui surfent au même niveau à l’approche de la quarantaine qu’à 20 ans.

Pour toutes ces raisons, je recommande en priorité à mes patients des sports a priori peu traumatisants. Encore faut-il qu’ils adoptent ensuite une bonne préparation, une posture correcte et évitent le surentraînement. Je conseille en premier lieu des activités physiques non traumatisantes comme la marche, la natation et le surf dans les conditions de pratique douce que je décris dans la méthode Surf Thérapie.

Tout ceci étant dit, le surfeur n’est pas totalement épargné par l’arthrose, a fortiori s’il pratique le surf « extrême » ou « aérien ».

*Traumatisme du rachis cervical du rugbyman en France. Y. Bohua, M. Julia, C. Bagate, J.-C. Peyrin, P. Thoreux, H. Pascal-Mousselard ; Journal de Traumatologie du Sport 25 (2008) 91–98

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