Il suffit de regarder un DVD de snowboard récent pour se rendre compte des risques que prennent les riders en hors-piste.

La pression médiatique qui pèse sur les sports de glisse est telle qu’il faut filmer des séquences toujours plus extrêmes…au péril des snowboardeurs et des personnes qui leur portent secours en cas d’accident.

Il n’est pas rare de voir, dans une séquence de freeride, un snowboardeur déclencher une avalanche et en réchapper. Jusqu’au jour où cela tourne vraiment mal…

Xavier De Le Rue, snowboarder professionnel, a bien cru que sa dernière heure avait sonné quand il a déclenché une gigantesque avalanche dans la pente du Châtelet située à 2537 mètres d’altitude le 29 Mars 2008.

La scène se déroule donc à proximité du col Grand-Saint-Bernard en Suisse un jour de grand beau temps. Xavier De Le Rue doit se faire filmer pour un sponsor avec un skieur. Ils se font déposer à la mi-journée par un hélicoptère au sommet d’une grande face abrupte avec des barres rocheuses à franchir.

Le skieur est le premier à s’élancer et il assure sa descente.

Puis vient le tour de Xavier de Le Rue de se lancer dans la pente. Dès le premier virage, une première plaque de neige part en avalanche. Pour l’éviter, Xavier change de direction mais heurte un rocher.  Il parvient à se rétablir in extremis et il continue sa descente. Il semble tiré d’affaire mais le pire reste à venir…

La première avalanche  a ébranlé le manteau neigeux en profondeur et soudainement la neige se disloque en centaines de gros cubes comme les pièces d’un puzzle géant avec notre malheureux snowboardeur au milieu de cette apocalypse. Xavier est enveloppé par la neige, il est emporté par l’avalanche et il perd connaissance. Il se souvient juste d’avoir été secoué comme pendant un gros bouillon sous une vague hawaiienne dont la puissance aurait été décuplée, selon ses propres termes. 

L’équipe du tournage assiste au drame impuissante et se lance immédiatement à la recherche de la victime. La tâche ressemble à la recherche d’une aiguille dans une meule de foin… Dans la panique, ils commencent par essayer vainement de détecter un signal avec leur appareil de recherche de victime d’avalanche (ARVA) depuis l’hélico…Cette idée saugrenue leur fait perdre de précieuses minutes. Les recherches au sol ne donnent rien jusqu’au moment où un skieur décide de chercher Xavier beaucoup plus bas. C’est là qu’il a été découvert inconscient après avoir été emporté 1200 mètres en contrebas… Il a immédiatement été hélitreuillé jusqu’à une station proche avant d’être pris en charge par un hélicoptère médicalisé qui l’a transféré aux urgences de l’hôpital de Sion.

Xavier De Le Rue s’en tire bien: il est sain et sauf et ne gardera pas de séquelle physique de cette avalanche.

L’équipe avait quand même pris quelques précautions au préalable:
– reconnaissance du terrain environnant depuis deux jours.
– pas d’avalanche lors des 48 dernières heures.
– un seul skieur à la fois sur la pente pour limiter la surcharge.

Mais quand on se lance dans une pente raide à 48°, orientée nord, surchargée en neige, on devine quand même que l’on prend de gros risques même lorsque le risque d’avalanche annoncé n’est « que » de 3 sur 5. On peut essayer de se trouver des excuses: observation insuffisante de la pente, manque de concentration, mauvais karma ce jour-là… Mais il ne faut pas accuser trop facilement la fatalité.

Quand on se risque sur de telles pentes, il faut être conscient que l’on risque sa vie à chaque descente, snowboardeur professionnel ou pas… Et il convient de se poser la question de savoir si le jeu en vaut la chandelle. Les quelques poignées de dollars que reversent les sponsors à leurs riders valent-elles le coup de jouer à la roulette russe ? Tout cela pour impressionner de jeunes amateurs en manque de sensations fortes derrière leur écran…et peut-être les inciter à prendre les mêmes risques…

Ce système est vraiment pervers. L’industrie de la glisse encourage à la prise de risque inconsidérée pour obtenir des images spectaculaires qui serviront à faire la réclame pour leurs marques de fringues ou de matos. Et cela est également valable pour le surf de grosses vagues où la surenchère médiatique continuera tant qu’il n’y aura pas eu un blessé grave ou un mort.

Xavier De Le Rue est un miraculé: il aurait pu se faire écraser par un bloc de neige dure, se fracasser contre un rocher ou un arbre mais il s’en sort sans la moindre fracture par l’opération du Saint-Esprit.

Quelles sont les raisons de son salut ?
– La chance +++: dans son malheur Xavier de Le Rue  a eu une chance inouïe.
– Xavier De Le Rue a eu le réflexe de déclencher son tout nouveau système Airbag sur son sac à dos (il venait de se le procurer…) qui lui a permis de rester en surface de l’avalanche.

Espérons que cette mésaventure servira de leçon à ce snowboardeur et à tous ceux qui risquent régulièrement leur vie pour quelques secondes d’adrénaline et une parution dans un magazine ou sur une vidéo…

Retrouvez le récit complet et les photographies ahurissantes de cet authentique miracle dans le magazine SnowSurf n° 111.

La descente et l’avalanche en question sont sur la vidéo YouTube ci-jointe à partir de la minute 2:22.

Le témoignage de Xavier De Le Rue après l’accident peut se lire en anglais sur son site Internet: http://www.xavierdelerue.com/sportifs/xavier_delerue/index_eng.php

Retrouvez les conseils de prévention pour le freeride dans la rubrique Snowboard Prévention.

A propos de l'auteur :

Surf Prevention est le site sur le Surf, la Sécurité, la Santé et l'Environnement.

 
 

2 Commentaires

  1. matthieu dit :

    sans vouloir défendre "le système", que je suis loin de cautionner, je voudrais juste signaler que de tous temps, des hommes ont pratiqué des sports extrêmes, et ce sans qu'il n'y ait forcément de cameras pour les filmer. Ces derniers portent bien leur nom: ils sont extrêmes… Ceux qui les pratiquent savent qu'ils risquent leur vie. Souvent ils ont des exemples de personnes, proches ou non, qui ont perdu la leur en pratiquant ce même sport. Je suis loin d'être persuadé que toute la faute en revient au sponsor ou au fait qu'il y ait une camera…

  2. Elsaesser dit :

    Vous êtes-vous renseignés sur les sacs ABS ? Ça existe depuis bien avant 2008, donc le système n’est pas nouveau…
    Et pour la petite histoire, on prend des risques de se faire écraser par une voiture en traversant la rue : ne faut-il plus la traverser, dans ce cas ?

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