Ce billet pour signaler que je pense que le nombre de grippe A/H1N1 est largement sous-évalué en France à l’heure actuelle.

J’ai vu ces derniers jours en consultation à mon cabinet de médecine générale un nombre inhabituel de personnes présentant des symptômes grippaux : fièvre, grande fatigue, toux,…

Ces signes cliniques ne sont évidemment pas spécifiques d’une grippe A et rien ne ressemble plus à une grippe A que n’importe quelle autre virose.

Le seul moyen pour un médecin généraliste de savoir si l’un de ses patients est atteint de cette grippe à l’heure actuelle est de passer par le centre 15 pour le faire admettre à une consultation spécialisée où on lui fera un prélèvement naso-pharyngé pour éliminer, ou poser le diagnostic de grippe A/H1N1 et prescrire, le cas échéant, un traitement antiviral et des mesures de précautions d’hygiène et d’isolement.

Quand j’ai dû contacter le centre 15 pour des cas suspects de Grippe A, on m’a rétorqué qu’ils n’entraient pas dans « les critères » parce qu’ils ne revenaient pas d’une « zone à risques »…mais une zone aussi touristique que la Côte Basque en Juillet n’est-elle pas de facto une zone à risques ?

Il y a 135 pays touchés par l’épidémie et la France reçoit des visiteurs de toutes nationalités pendant les vacances.

Prenons l’Angleterre par exemple où plus de 7 500 cas ont déjà été diagnostiqués, de nombreux estivants anglais viennent en vacances en Aquitaine : quand on sait que certains jeunes anglais organisent des « Grippe Party » pour se refiler le virus tant qu’il n’est pas virulent et que des projections estiment à 100 000 le nombre de nouveaux cas de grippe A par jour d’ici à fin août, on peut se dire que nous sommes tout aussi concernés qu’eux par cette grippe !

A ce stade de l’épidémie, la notion de « zone à risques » me paraît totalement dépassée vu que la Terre entière est concernée par le virus. Avec les transports aériens, les virus de ce type ne connaissent plus les frontières.

Si la France ne compte encore que 371 cas de grippe A, c’est tout simplement parce que l’on ne les diagnostique pas tous !

Mon beau-frère qui présente tous les symptômes d’une grippe vient d’appeler le 15 : on lui a dit que ce n’était « certainement pas » une grippe A et conseillé qu’il aille consulter…son médecin généraliste (qui n’a aucun moyen d’établir le diagnostic) !!!

Cette grippe ne semble pas être très virulente pour le moment mais il faudrait au moins pouvoir suivre son évolution de façon fiable en France, ne serait-ce qu’à visée épidémiologique…

Dr Guillaume Barucq.
Médecin Généraliste.

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13 Commentaires

  1. Guillaume dit :

    Ecouter Roselyne Bachelot à la minute 11:45 : le Centre 15 reste la clé d'entrée dans le dispositif de prise en charge des patients suspects de grippe A avant un élargissement envisagé à la Médecine de Ville.

  2. Dr Sanchez dit :

    300 cas en France de Grippe A, la situation est sous controle!!!!! C'est formidable ce pays, première destination touristique mondiale, où le virus ne se développe pas, stoppé comme le nuage de tchernobyl…

    Soyonc clairs, le dépistage du virus en France est catastrophique, notre plan de pandémie totalement "vérolé", témoin de l'état déplorable de notre système de santé.

    Cette grippe n'est pas plus grave que les autres, mais sa contagiosité est extrême, car la population n'a pas de défense immunitaire contre ce nouveau virus.

    Au lieu de 3 millions de grippes saisonnieres cette année en France, on risque d'avoir 20 millions de cas. Et donc au lieu de 3000 morts, peut être 20 000 cette année.

    Vive les apparences…

  3. Dr Barucq dit :

    L'hôpital ne les prend plus systématiquement en charge.

    Mais les médecins généralistes n'ont toujours pas été inclus dans le dispositif pour traiter les malades…

    Les recommandations du Ministère de la Santé sont en décalage total avec la situation sur le terrain.

  4. dumetz dit :

    c'est un site de prévention de la grippe???

    la-men-table…. et très confraternel… (mais peu étonnant)

    Je pense que je vais envoyer l'adresse de cette page aux responsables du centre 15 de la cote basque. Ils seront surement très content de te voir t'étaler de la sorte "doc"….

    Dr Dumetz

    urgences-SAMU-SMUR

    (qui passe ses nuits à réguler la permanence de soins, mission première des médecins de ville)

  5. Guillaume dit :

    Cher Dr Dumetz,

    Il ne me paraît pas anormal de parler de grippe A sur un blog qui traite de santé et de prévention.

    Je ne vois pas ce qui est dit dans cet article qui accablerait les centres 15.

    Il s'agit juste d'une constatation : les consignes qui vous ont été données ont permis de ne pas diagnostiquer de nombreuses grippe A que ce soit sur la Côte Basque ou n'importe où ailleurs en France.

    J'ai participé à un débat sur le sujet sur le site Internet de LCI (voir commentaire ci-dessous) et l'un de tes confrères en convenait : d'innombrables syndromes grippaux n'ont pas été investigués ces dernières semaines. (On n'en est plus à les compter maintenant).

    Je connais les difficultés de votre métier que je respecte au plus haut point ainsi que la délicatesse d'une régulation téléphonique.

    Il faut aussi comprendre nos difficultés en tant que généralistes de terrain : évoquer un diagnostic de grippe A devant un patient et le voir récuser de façon arbitraire par un régulateur n'a rien de 'confraternel'.

    Je crois que ce n'était pas à vous qu'incombait la prise en charge de banals syndromes pseudo-grippaux : vous avez déjà suffisamment à faire avec les accidents de la route, les infarctus et toute la lourde pathologie qui relève de la médecine d'urgence.

    Mais dès cette semaine nous (les médecins généralistes) revenons enfin au centre du dispositif après en avoir été shuntés : ce qui veut dire que nous allons enfin pouvoir represcrire du Tamiflu aux patients présentant un syndrome grippal par exemple (ce n'était pas le cas jusqu'alors).

    Arrêtons de nous tirer dans les pattes entre médecins de ville et médecins hospitaliers mais acceptons le débat sur ce genre de prise en charge.

    Pour info, j'ai communiqué ce billet le jour-même de son écriture au responsable du SAMU 64A.

    Bien confraternellement.

    Guillaume Barucq.

  6. Guillaume dit :

    Extraits de témoignages sur un article parlant de grippe A sur LCI.fr : http://tf1.lci.fr/infos/sciences/sante/0,,4473050…

    Témoignage d'une mère de famille : le 15/07/2009 à 18h54

    Comment parler de 628 cas ? Samedi soir, SOS médecin m'a dit que mon fils avait "probablement" la grippe A. Qu'il était inutile de faire des tests, et de le soigner au paracétamol … de téléphoner au 15 en cas de détresse respiratoire. Soit. J'ai tout de même appelé l'hôpital Neker, lorsque mon fils a atteint les 40° de fièvre qui m'a redit exactement les mêmes choses. Soit. Mon fils va très bien. Plus de fièvre… Mais fait-il parti des 628 cas ? Combien de cas ne sont pas comptabilisés ? J'aimerais qu'on m'explique ?!

    ESB, PARIS

    Témoignage d'un généraliste (moi) : le 15/07/2009 à 23h12

    C'est exact ESB ! Le nombre de cas est vraisemblablement largement sous-évalué en France. On ne fait le test de diagnostic de la grippe A qu'à certains cas quand ils sont groupés ou "graves" (autant dire très rarement). Moins on fait de tests aux gens, moins il y a de cas officiels en France. Objectivement, je pense que le nombre de cas en France se compte déjà par milliers, sans compter tous les sujets porteurs asymptomatiques du virus. En réalité, le virus circule bel et bien et nombre de Français seront déjà immunisés contre la grippe A quand le vaccin sera disponible. Je suis médecin généraliste et à chaque fois que j'ai eu une forte suspicion de grippe A chez un patient, le 15 (qui ne fait qu'appliquer les consignes ministérielles) m'a conseillé de le laisser à la maison avec du paracetamol (pas de prélèvement donc pas de diagnostic donc un cas de moins comptabilisé en France !)

    Guillaume, Biarritz

    Témoignage d'un urgentiste : le 16/07/2009 à 09h27

    Bonjour. Bien-sûr que le nombre de cas de grippe A est TRES LARGEMENT SOUS-ESTIME. Tout dépend de la décision que nous-autres, médecins (je suis médecin urgentiste), prenons devant un syndrome grippal, à savoir demander ou non une sérologie H1N1. Par exemple, à Megève, un médecin a fait effectuer une sérologie à tous les cas de grippe qu'il rencontrait. (Il a fait son travail, je le respecte et ne lui en veut pas le moins du monde). Résultat très positif ! et les pauvres enfants en colonie de vacances se voient mis en quarantaine jusqu'à la fin de leur séjour. Le problème est de savoir si cette grippe A est plus grave que les autres grippes et si la pandémie dont notre planète est victime pourrait conduire le monde vers sa fin. A mon humble avis je n'y crois pas, Dieu merci, mais ce n'est qu'une opinion personnelle.

    Hopy-one, Brignais

  7. COUDREUSE dit :

    Mon cher confrère,

    Il me semble que ce genre de décision (gestion hospitalière ou ambulatoire… etc…) est, dans le cadre d'une "situation exceptionnelle", du domaine de décision d'ordre national, avec des décisions harmonieuse se prenant au niveau des instances de santé dont c'est le rôle. Le choix dans un premier temps de centrer les prises en charge en milieu hospîtalier et de ne pas inclure la médecine de ville dans le dispositif initial est "tactique", l'essentiel étant de ne pas "déborder" le systême de soins ambulatoires et de ne pas céder à la panique ainsi que de ne pas avoir trop de cellules à informer en temps réel (remise à jour quasi-journalière).

    Moi ce que je trouve déplorable dans ce pays c'est que tout le monde puisse donner son avis sur tout et nourrir de ce fait de multiples polémiques. Ce sont des situations délicates.

    Je vous propose dans un premier temps de passer la capacité de médecine de catastrophe pour savoir "un peu plus" de quoi vous parlez, car, en temps que professionnel de la santé, vous devez savoir que l'on doit être d'autant plus prudent que l'on est "écouté".

    Cordialement

  8. Cher Dr Coudreuse,

    L'une des avancées majeures d'Internet est justement de donner la parole à tout le monde : que ce soit au citoyen lambda ou au petit médecin généraliste de base.

    Cela fait partie intégrante de ce que l'on appelle la démocratie participative.

    Un blog, ce sont souvent des billets "d'humeur" que chacun peut lire et commenter librement.

    Cette "polémique" sur le non-comptage des cas de grippe A en France est déjà dépassée.

    Tu peux me faire confiance pour continuer à donner mon point de vue sur ce blog comme le fait l'un des trop rares médecins à monter au créneau au France : le médecin urgentiste Patrick Pelloux.

    Bien sincèrement.

  9. dumetz dit :

    cher docteur Barucq

    il est bien évident que le nombre de cas en France est très largement sous-estimé si l'on considère uniquement les cas dépistés (et non pas les cas suspects ou possibles). Ce n'est pas cela que je conteste dans ton "billet", publié publiquement sur ton blog SURF-PREVENTION….

    Maintenant si tu ne vois pas ce qui pourrait accabler les centres 15 dans ton "billet" (centre 15 qui je le rappelle ne font qu'appliquer les directives ministérielles en accord avec l'InVS), je te recopie les passages pour le moins tangents…:

    1)"le centre 15 récuse de nombreuses infections d'allure banale". C'est le lien par lequel on accède à cette page… Le centre 15 (et les médecins qui y travaillent) ne prennent pas en charge les "infections d'allure banale" mais les cas possible de grippe A (cf définition du cas suspect,possible ou confirmé de grippe A, ainsi que du cas exclu…) Sachant que ces définitions changeaient très fréquemment en fonction des zones de provenance des patients. Ça n'est plus le cas actuellement: fièvre>38°+arthralgies ou myalgies+signes respiratoires=cas probable de grippe A. Le fait d'exclure des infections d'allure banale ne me semble donc pas anormal, mais dans le contexte ou tu l'écris si… Ceci n'est pourtant pas le fait du centre 15.

    2) "Quand j’ai dû contacter le centre 15 pour des cas suspects de Grippe A, on m’a rétorqué qu’ils n’entraient pas dans “les critères” parce qu’ils ne revenaient pas d’une “zone à risques”…mais une zone aussi touristique que la Côte Basque en Juillet n’est-elle pas de facto une zone à risques ?"……

    on t'a "rétorqué" ou répondu?? Si à l'époque (probablement début juillet) et selon toi, le pays basque était une zone à risque, il fallait prévenir l'InVS et le ministère de la santé. Encore une fois, le centre 15 ne fait qu'appliquer des directives nationales.

    3) "Mon beau-frère qui présente tous les symptômes d’une grippe vient d’appeler le 15 : on lui a dit que ce n’était “certainement pas” une grippe A et conseillé qu’il aille consulter…son médecin généraliste (qui n’a aucun moyen d’établir le diagnostic) !!!"

    A l'époque ou ton beau-frère a été exclu des cas possible ou suspects, c'est qu'à nouveau il n'entrait pas dans les critères du ministère de la santé pour la grippe A… On ne fait qu'appliquer les directives du ministère.

    De plus, sache que le tamiflu ne se prescrit pas aux patients qui présentent un syndrome grippal simple (car alors ces patients n'entrent pas dans la définition des cas possibles), mais aux patients qui présentent un syndrome grippal+signes respiratoires (cas de grippe A possible) ET présentant des facteurs de risques (définition des facteurs de risque disponible sur site de l'InVS). De même, tous ces patients ne seront pas systématiquement prélevés pour établir de manière certaine le diagnostic: encore une fois ce sont des directives nationales, appliqués par le centre 15…

    j'accepte le débat sur les prises en charge, la seule chose est que ce débat n'a pas lieu d'être entre nous:cela se joue à un plus haut niveau. Néanmoins tu ne cites que des exemples personnels, mettant en jeu ton expérience avec les acteurs de santé de ta région, et en te lisant, on a quand même l'impression que tu n'est pas content des réponses qui te sont apportées "par le centre 15".

    bien confraternellement…….

    Matthieu Dumetz

  10. Nous sommes bien d'accord Matthieu : ce sont les directives qui vous ont été données que je remets en cause.

    Mais en aucun cas votre travail que vous accomplissez avec compétence et grand professionnalisme.

    La définition qui vous a été donnée pour suspecter une grippe A est un non-sens.

    – On peut juste avoir 38,2°C de fièvre et avoir une grippe A.

    – On peut être seulement fatigué et avoir une grippe A.

    – On peut n'avoir aucun symptôme et avoir une grippe A.

    C'est ça la réalité.

    En incluant seulement les cas présentant toute la panoplie des symptômes d'une grippe A pour ENVISAGER un dépistage ou une prise en charge, la France n'a pas joué le jeu des autres pays qui ont fait un recensement des cas beaucoup plus exhaustif.

    Ce qui me fait réagir est que certains politiques communiquent en disant : "nous avons mieux maîtrisé la situation que les pays voisins car nous avons moins de cas".

    FAUX : les consignes qui ont été données aux centres 15 n'ont permis d'en diagnostiquer qu'une petite partie.

    Le nombre de cas officiellement déclarés n'est que la partie émergée de l'iceberg.

  11. Coudreuse dit :

    Ce n'est nullement la liberté d'expression que je remet en cause et je ne crois pas qu'il existe des citoyens lambda ni encore moins des médecins généralistes "de base" comme vous l'écrivez mais pour ce dernier je crois en son professionnalisme et a sa capacité de retenue et d'humilité face a son non savoir. Je pense d' ailleurs que c est une des plus importante qualité que devrait avoir un médecin. Tout le monde est libre de s exprimer mais dois savoir mesurer ses propos surtout un professionnel de la santé. Je pense que le dr pelloux comme vous le citez si bien quand il s exprime sait, lui, de quoi il parle.

    Cordialement

  12. "Je ne sais qu'une chose c'est que que je ne sais rien" disait Socrate.

    J'essaye tous les jours de rester humble face à notre connaissance très parcellaire devant l'étendue du savoir médical.

    Ceci étant dit, quand je parle de quelque chose, j'ai généralement étudié le sujet à fond.

    En tant que médecin responsable d'une association de permanence des soins, je m'informe au quotidien des recommandations qui nous sont données.

    Cela n'empêche pas de les discuter ou de les remettre en cause.

    Pour résumer tout le blabla, je n'affirme qu'une seule chose : nous ne nous sommes pas donnés les moyens de comptabiliser de façon fiable les cas de grippe A à la phase initiale de l'épidémie : avec comme résultat un nombre de cas largement sous-évalué.

    Je ne vois pas quel médecin qui connaît son sujet pourrait contester cette affirmation.

    Je vous renvoie vers l'excellente interview du Pr Patrick Berche : https://blog.surf-prevention.com/2009/07/19/grippe

  13. Mes confrères et moi sommes confrontés à une vague de syndromes grippaux depuis les Fêtes de Bayonne…

    Le virus poursuit sa propagation allègrement et le chiffre officiel d'un millier de cas s'éloigne de plus en plus de la réalité.

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