Aboutissement de 3 ans de travail, l’Anses vient de publier les résultats de l’évaluation des risques sanitaires associés au bisphénol A. Ce travail est accompagné de 3 autres rapports : état des lieux des alternatives au bisphénol A, évaluation des dangers d’autres composés de la famille des bisphénols, et rapport sur les incertitudes entourant les perturbateurs endocriniens.

Ce travail a été réalisé par un groupe de travail dédié aux perturbateurs endocriniens, avec l’appui de plusieurs collectifs d’experts de l’Agence. Il s’est basé sur une revue de toutes les études disponibles au niveau international et sur le résultat de campagnes de mesure diligentées par l’Agence sur la présence de bisphénol A dans les différents milieux auxquels la population peut être exposée.

Ce travail prend en compte – pour la première fois – une estimation des expositions réelles de la population au bisphénol A par voie alimentaire, mais aussi par inhalation (via l’air ambiant) et par voie cutanée (au contact de produits de consommation).

L’alimentation contribue à plus de 80% de l’exposition de la population. Les principales sources d’exposition alimentaire sont les produits conditionnés en boîtes de conserve qui représentent environ 50% de l’exposition alimentaire totale. L’Agence a également identifié l’eau distribuée en bonbonnes de polycarbonate comme une source conséquente d’exposition au bisphénol A.

Par ailleurs, les travaux ont également conduit à identifier d’autres situations d’exposition, notamment liées à la manipulation de papiers thermiques (tickets de caisse, reçus de cartes bancaires, …), en particulier dans un cadre professionnel.

Les conclusions de l’évaluation des risques, réalisée sur la base des dangers identifiés à partir d’études conduites sur des animaux et de la caractérisation des expositions, montrent un risque potentiel pour l’enfant à naître des femmes enceintes exposées. Les effets identifiés portent sur une modification de la structure de la glande mammaire chez l’enfant à naître qui pourrait favoriser un développement tumoral ultérieur.

L’ANSES a pu établir «un niveau toxicologique au-delà duquel le risque est associé», soit le niveau d’exposition au BPA au-delà duquel on considère qu’il existe un risque pour l’être humain, explique Dominique Gombert, directeur de l’évaluation des risques à l’agence.

Sources d’exposition
En moyenne, l’alimentation contribue majoritairement à l’exposition (84% pour la femme enceinte). Concernant les principales sources d’exposition alimentaires et quelles que soient les populations concernées, l’expertise identifie 3 grandes catégories :
– Les produits conditionnés en boîtes de conserve qui représentent environ 50% de l’exposition alimentaire totale et se décomposant comme suit 35 à 45% pour les légumes ;10 à 15% pour les plats composés et produits à base de viande et de poisson.
– Certains aliments d’origine animale : autour de 17% pour les viandes, abats et charcuterie, entre 1 et 3% pour les produits de la mer.
– Une contamination diffuse dont l’origine n’est pas identifiée qui représente entre 25 et 30% de l’exposition alimentaire totale.

Le calcul de l’exposition via les bonbonnes d’eau en polycarbonate montre que l’eau conditionnée dans ces bonbonnes constitue une source significative d’exposition au bisphénol A. Sa consommation peut contribuer à une augmentation de l’exposition au bisphénol A et pourrait, ainsi ajoutée aux autres expositions, entraîner un risque « additionnel » pour l’enfant à naître de la femme enceinte exposée.

L’évaluation spécifique des risques liés à la manipulation ou l’usage de produits et/ou articles destinés au grand public contenant du bisphénol A montre que la manipulation de tickets thermiques conduit à des situations potentiellement à risque pour les quatre types d’effets considérés dans l’évaluation des risques, mais avec un niveau de confiance jugé par les experts de « limité », au regard de très nombreuses incertitudes. Les modèles et hypothèses retenus contribuent en effet certainement à surestimer les expositions calculées en lien avec la manipulation de tickets thermiques, ce qui va conduire à engager un travail complémentaire pour mieux estimer la quantité de bisphénol A effectivement absorbées par voie cutanée.

Suite au précédent avis de l’Anses en septembre 2011, le Parlement a adopté en décembre 2012 une loi visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A (cette loi ne sera effective qu’à partir du 1er janvier 2015 NDLR). Cette nouvelle législation devrait conduire à une baisse très significative du niveau d’exposition au bisphénol A, dont il conviendra d’évaluer l’impact dans le temps et de s’assurer de l’innocuité des substituts mis en oeuvre. En particulier, en l’absence de données scientifiques complémentaires, l’Agence n’encourage pas à utiliser d’autres bisphénols comme solution de substitution au bisphénol A.

En matière de plastiques alimentaires, le bisphénol A est actuellement utilisé pour :
– la fabrication d’une matière plastique : le polycarbonate qui est un plastique dur, transparent, recyclable… Il peut être confondu avec des matériaux tels que le plexiglas ou le polypropylène, par exemple…
– La fabrication de certaines résines époxydes qui servent de vernis de revêtement à l’intérieur de certains contenants alimentaires. Les vernis sont destinés à la protection des emballages métalliques et constituent un film continu de très faible épaisseur.

Il est très difficile en l’absence de mentions d’étiquetage précises sur les contenants d’être sûr de l’absence de bisphénol A. Toutefois, dans les cas les plus courants, les principes suivants permettent de déterminer les contenants alimentaires les plus susceptibles de constituer une source de bisphénol A :

Reconnaître un ustensile en polycarbonate
A ce jour, le marquage des plastiques alimentaires n’est pas obligatoire même s’il est couramment pratiqué par les fabricants. Le pictogramme dans lequel sont inscrits les chiffres 1 à 6 permet de savoir que le matériau n’est pas du polycarbonate. Lorsque celui-ci présente le chiffre 7 qui correspond aux « autres plastiques », le matériau peut être composé d’une large gamme de matières plastiques, sauf s’il porte en dessous le sigle PC qui indique qu’il s’agit de polycarbonate. Sans marquage spécifique, le polycarbonate est un matériau difficilement reconnaissable d’autres matières plastiques rigides sans risque d’erreurs. Ce composé peut être présent dans une gamme variée d’ustensiles de cuisine : blender (mixer), boites hermétiques micro-ondes, cuves d’auto-cuiseur, douilles de pâtisserie, pichets, bacs de réfrigérateur,…

Reconnaître les boites de conserves susceptibles de contenir du bisphénol A
En ce qui concerne les boites de conserves métalliques, il est aujourd’hui très difficile de reconnaître avec certitude celles susceptibles de contenir du bisphénol A. Les pratiques industrielles, notamment en France, ont probablement évolué suite aux discussions sur ce composé et ont donc potentiellement entraîné une réduction d’emploi du bisphénol A. On peut toutefois indiquer que :
– Les conserves en verre ne contiennent généralement pas de bisphénol A (à l’exception possible du vernis présent sur le bouchon).
– Les boites de conserves métalliques (canettes, boites rectangulaires, boites cylindriques…) peuvent être classées en 2 catégories :
* Produits a priori sans bisphénol A : Boites composées de « 2 pièces » uniquement, un corps, obtenu par emboutissage d’une feuille métallique, et un couvercle serti après remplissage, c’est le cas, notamment, des canettes ;
* Pour les autres: Boites composées de « 3 pièces », un corps et 2 éléments sertis (fond et couvercle), c’est essentiellement le cas des boites de conserve cylindriques. Dans ces boites, la présence de bisphénol A est possible et d’autant plus probable que l’aliment concerné est acide.

Sources alimentaires potentielles d’exposition au bisphénol A :
– La consommation de produits conditionnés en boites de conserves susceptibles de contenir du bisphénol A (et également le réchauffage d’aliments directement dans de telles boites de conserves),
– L’usage alimentaire d’ustensiles ou de contenants ne portant pas un marquage permettant d’exclure la présence de polycarbonate (1 à 6) et plus particulièrement :
– Le stockage prolongé de denrées alimentaires dans de tels contenants
– L’utilisation de contenants abîmés (rayés, usés…)
– Le réchauffage des produits au four à micro-ondes dans des contenants réutilisables susceptibles de contenir du bisphénol A ou la cuisson dans des appareils où les aliments sont en contact avec du polycarbonate (cuit-vapeur,…).

Source ANSES

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1 commentaire

  1. Pedro Flores dit :

    D’autre part, les progrès de l’industrie métallurgique ayant permis la réduction de l’épaisseur des boites (de 20 à 30 %), celles-ci, plus économes en matières premières et en énergie, sont devenues plus légères ; comme l’amélioration des formes a rendu ces emballages plus compacts et empilables, de grandes quantités de produits peuvent être transportés dans un volume plus limité. Ces différents facteurs permettent de diminuer l’ empreinte carbone .

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